Françoise Clédat | Gemelle

Publié le 21 février 2018 par Angèle Paoli

GEMELLE

j'y mêle
vile
et femelle


Comme
C dire animaux doux mots avant que
Conduits à l'abattoir

C omme me promenant dans la campagne sous le ciel immense un pur sourire m'est venu aux lèvres je nous ai pris par la main toi petit garçon moi petite fille à dévaler le chemin dans le dernier soleil suspendu au-dessus des bois noirs, à respirer la bonne odeur des génisses qui nous enveloppait soudain le long des prés humides, j'ai pensé qu'il n'y avait qu'à toi que je pouvais parler de l'odeur des génisses, que toi qui pouvais la respirer avec moi au présent de notre commune enfance rire et rire encore de ses rajeunissants effets de génissement, et en telle confusion de sonorités me suis arrêtée -ayant un instant cru tenir, quasi indolore, la lettre de notre jeunesse perdue.

Françoise Clédat, "
Comme partie de la maison pour aller vers la rivière il faisait presque chaud bien qu'en hiver la campagne silencieuse et vide - la faillite maternelle m'est tombée dessus je ne suis parvenue à la secouer qu'en écrivant sur mon smartphone le silence de la campagne l'obsolescence de sa splendeur (carnet emporté mais crayon oublié sur la table), sitôt le poème enregistré la légèreté m'est revenue son flux de gaieté, c'est alors que je nous ai pris par la main.
Comme elle aime et doux mots avant que magnifiée par leurs
échanges caressants
la double forme d'une érotique que relancent l'évocation de ton corps - le désir fou la jouissance inépuisable qu'il suscite - et cette autre évocation que fait lever ta voix par-delà la teneur des propos et l'entente qu'ils manifestent, une proximité si confiante qu'elle approche au plus près une région que je relie à cette gémellité d'enfance que toi seul me fais éprouver.
GIMMEL, GIMAL, GHIMEL ou GUIMEL (c, g) ", Ils s'avancèrent vers les villes, Tarabuste éditeur, 2017, pp. 59-61.