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Le Pouvoir – Naomi Alderman

Publié le 06 mars 2018 par Malm @3615malm

Les femmes ont pris le pouvoir. Ah non non, pas du tout, pardon, je me trompe : dans Le pouvoir, les femmes ne PRENNENT pas le pouvoir, il le leur est DONNÉ – par l’opération du Saint-Esprit (ou presque).

L’autrice

Naomi Alderman est romancière et créatrice de jeux vidéos. Repérée, lue et appréciée dans son cher pays natal (la Grande-Bretagne) depuis trois romans déjà, Alderman livre ici un ouvrage qui crie un peu « regardez ce dont le suis capable » de la première à la quatrième de couverture. Et, effectivement, capable, Naomi Alderman l’est (ça oui) – même si quelques soucis de traductions cucu la praline et différentes descriptions soporifico-longuettes viennent parfois agacer (légèrement, rien de grave) le.a lecteur.rice.

ATTENTION, le texte, dans son intégralité, reste quand même, nécessaire (si). N’allez pas ne pas lire le bouquin à cause de trois pauvres réserves de ma part. Sérieusement.

De quoi ça parle ?

En gros, certaines mutations génétiques (apparues suite à des empoisonnements de nappes phréatiques post WW II) procurent à l’intégralité des homos sapiens-sapiens de sexe féminin d’aujourd’hui la capacité d’activer un fuseau d’électricité présent dans leur corps – telles nos ancêtres commun.e.s les raies manta et autres anguilles électriques : mais oui.

Alors bon, le fuseau électrique, il est en fait niché dans la clavicule de toute une chacune. Cette nouvelle puissance électrokinésique fait donc de la femme (et exclusivement de celle-ci, à peu d’exceptions près) un être capable d’envoyer des décharges à qui mieux mieux via la paume de sa main – à la manière de Spiderman, un peu, quand il crache sa soie par le dessous du poignet. Du moins, c’est ce que j’ai cru comprendre, relativement au mode opératoire et tout ça.

Apparemment, dans le roman, ce super-pouvoir (celui de faire des arcs électriques comme dans le métro mais avec tes mains), aurait été présent en nous depuis l’époque pas si lointaine où nous étions des guenons. Il attendait simplement d’être « réveillé ». Maintenant qu’il est bien aware, le fuseau – comme dirait Jean-Claude – la peur change brutalement de camp : depuis le wagon glauque du RER à une heure du mat’ (tu sais, celui où t’es toute seule, un peu cuite, en minijupe, et dans lequel t’as pas qu’un tout petit peu les chochottes de te faire découper en Apéricubes par le type qui s’est assis en face de toi alors que le wagon est vide) jusqu’aux plus hautes sphères de l’état, les bonshommes se mettent à claquer des fesses. Sec. Et ça part en vrille assez vite, tout ça. Ben oui. « Chacun son tour », dirons certain.e.s. Mais pas moi. J’aurais bien trop peur de me faire pirater mon compte bancaire, qu’on menace mes enfants de mort et mon mari de castration. La peur qui change de camp, ce n’est, encore et toujours, « que » de la littérature.

Dans Le pouvoir, le lecteur suit essentiellement les pérégrinations de trois personnages, dont les destins – tout comme celui de l’humanité toute entière – basculent dans un nouvel ordre mondial, telles de petites boîtes de conserve vides négligemment jetées dans un vide-ordure géant.

J’en profite pour préciser quelque chose là maintenant : vous aurez peut-être noté que l’écriture inclusive est utilisée dans l’ensemble du blog mais de manière plus ou moins aléatoire. La raison pour laquelle je procède de cette façon est toute simple : je le fais parce que je le peux. Parce que j’en ai le pouvoir. Capice ?

Pourquoi le lire, Le pouvoir ?

  • Parce qu’il y est question, pour une fois, de vraie sororité, au sens profond du mot, de ce en quoi cela consiste(rait)
  • Parce qu’Alderman, fille d’un grand historien, construit son récit à la façon d’un roman historique : de manière minutieuse, scientifique, précise
  • Parce que l’ouvrage entier pousse à réfléchir vraiment sur ce qu’est le pouvoir, concrètement : quel que soit celui ou celle qui le détient, les conséquences de son exercice finiront toujours par devenir problématiques (dangereuses, oppressantes etc.)
  • Parce que, justement, cette réflexion sur le pouvoir, la force physique, l’évolution pure et simple de l’être humain et les enjeux liés à sa survie – plus les allégories autour de ce qu’il représente, ce pouvoir, la forme qu’il prend, la métaphore de l’arbre, la toile d’araignée (Spiderman ? Tu es là ?) – valent le détour
  • Parce qu’Atwood (La Servante écarlate) est TRÈS citée, en tant que référence absolue et ultime d’Alderman
  • Parce que les bons romans d’anticipation (et/ou dystopiques) nous font voir notre monde comme jamais (Ubik1984La nuit des temps… impossible de tous les citer : c’est un genre parfaitement sous-côté que j’apprécie particulièrement)
  • Parce que les échanges de courriers, à la fin, entre la relectrice et son auteur valent un sacré pesant de bon paquet de cacahuètes – ça ne veut rien dire, je sais, mais peu importe : « vous m’avez compris », comme disait le Général de Gaulle #rires
  • Parce que, comme évoqué au début de ce post, le pouvoir est, ici, « donné » aux femmes et que c’est peut-être dans ce détail-là, précisément, dans le fait-même que les femmes accèdent soudainement à une forme de supériorité physique qui leur permet d’avoir toujours le dessus et d’inspirer la crainte que se loge la part la plus importante de merveilleux, d’extraordinaire, de science-fiction
  • Parce que la mise en scène de la fachosphère, des théoriciens du complots, des forums de discussions, des « anti-féminazis » est rondement menée par Alderman
  • Parce que dans le roman, Dieu est une femme (comme Alanis Morissette dans Dogma, mais en mieux).

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