Vendredi 4 mai
8h45 : Je fais un saut à la bibliothèque universitaire de lettres où j’ai mes habitudes : il y a des voitures de police à proximité de la fac… J’apprends que l’établissement fait l’objet d’une fermeture administrative et que les étudiants qui occupaient un amphithéâtre ont été évacués ! Ambiance, ambiance… J’imagine aisément avec quelle délicatesse l’évacuation s’est faite ! C’est tellement plus facile (et sûrement plus marrant, n’est-ce pas ?) de taper sur les étudiants que d’affronter les « blacks blocs » ! Un policier, me voyant passer, me demande où je vais : le temps où j’avais un look de puceau qui n’inspirait pas la méfiance est révolu, mes cheveux longs, ma barbe et mon cuir noir doivent sûrement me rendre suspect aux yeux de cet agent ! Je lui réponds que je m’en vais (ce qui est vrai) et il me laisse partir, admettant que je ne devais pas être dans l’amphi ce matin… Pauvre cloche, si tes collègues parisiens avaient mis autant de zèle pour arrêter des individus armés et agressifs que tu en as mis toi-même pour contrôler un gros pépère qui n’aurait pas pu s’enfuir même s’il en avait eu envie, la capitale de notre foutu pays aurait évité une journée de cauchemar !
9h : Je continue à affronter le côté obscur de la France en me rendant au centre des finances publiques pour demander des éclaircissements sur un mail reçu l’avant-veille et qui me menace d’une amende si je ne remplis pas un formulaire censément disponible en ligne mais dont la localisation exacte n’est pas précisée – je vous passe les détails pour éviter de devenir franchement rébarbatif, sachez seulement qu’il en va ainsi depuis le 1er janvier 2018 suite à je ne sais trop quelle loi pondue par quelque grand commis de l’Etat pour justifier son salaire. Toujours est-il que la dame qui m’accueille m’annonce que je suis déjà le quatrième depuis l’ouverture (donc il y a une demi-heure) du centre à venir exactement pour les mêmes raisons ! Elle en est quitte pour me remettre le formulaire sous forme imprimée… En fait, aux impôts, ils ont le même problème que dans les écoles : les réformes pleuvent sur eux si vite qu’ils n’ont pas le temps de s’adapter ! Pour un ministre, imaginer une nouvelle loi ne pose problème, il n’a que ça à foutre et, surtout, ce n’est pas lui qui va l’appliquer, son idée géniale, ce douteux privilège revenant aux fonctionnaires de base pour lesquels s’habituer aux nouvelles dispositions demande un temps d’adaptation qui vient empiéter sur leur temps de travail (le manque à gagner pour l’efficacité de l’administration n’est comptabilisé nulle part), à tel point que, le temps pour eux de s’être pleinement adaptés à la nouvelle loi, il n’est pas exclu qu’une autre leur retombe dessus et les oblige à tout reprendre à zéro ! Devant un tel constat, je frémis rien qu’à imaginer ce que ça va donner quand le fameux « prélèvement à la source » dont on nous rebat les oreilles entrera en application : ça risque de créer plus de merdier qu’autre chose ! On critique beaucoup les fonctionnaires, surtout ceux du fisc, mais ils font ce qu’ils peuvent : au-dessus d’eux, il y a des bons à rien qui sèment des lois de façon anarchique et qui obligent les autres à tout récolter à la main ! Les Italiens qui n’ont pas de gouvernement depuis des mois ne connaissent pas leur chance…