Résumé de l’épisode précédent : Notre héros a réussi à interview François Hollande. Il s’apprête à quitter la librairie, mais…
16h35 : J’étais sur le départ mais, après quelques secondes d’hésitation, je me suis décidé à aller jusqu’au bout de mes projets : j’exécute donc sur place une caricature de Hollande pendant qu’il continue à dédicacer. Le résultat n’est pas trop mal pour un dessin réalisé debout dans une salle bondée et surchauffée, d’autant qu’il a fallu brièvement céder le passager à un jeune garçon en fauteuil roulant (normal) et que j’ai dû encaisser les rouspétances d’une vieille (je crois que c’est la même qui m’a grillé ma place dans la file) qui se plaignait que je la gène pour prendre une photo ! Et après, on dit que les jeunes ont le monopole de l’incivilité… J’offre mon dessin à Hollande, histoire qu’il ait un souvenir original de Brest, puis je repars, satisfait du devoir accompli et soulagé de m’extraire de cette ambiance délétère où la librairie n’est plus qu’un désert hostile peuplé de dédicassivores qui n’ont rien à voir avec de « vrais » lecteurs et se ruent sur un auteur côté comme les charognards sur un cadavre… Finalement, c’est Hollande lui-même qui m’aura paru le plus sympathique, ce qui est dans la logique de son quinquennat au cours duquel ses opposants les plus farouches avaient été la Manif pour tous, le Front National, les Bonnets rouges, les fans de Dieudonné et autres néo-fachos qui, à l’époque, avaient inspiré à l’ami Jérôme ce commentaire on ne peut plus pertinent : « Être impopulaire dans un pays de cons, c’est une qualité » !
19h30 : Rentré au bercail après cette journée éprouvante, je tombe sur le journal de France 3 et je remarque une initiative louable de la rédaction de la chaîne publique. Ils ont eu la bonne idée, en effet, de rediffuser un des reportages que l’ORTF réalisait sur la vie du général De Gaulle à la veille de mai 68 : on y montrait le fort de Brégançon où le couple présidentiel était parti en week-end, les têtes à claques du coin qui trouvaient légitime que le président se repose, les commerçants qui se réjouissaient des retombées pour leurs boutiques… Devant une séquence aussi obscène, on comprend mieux pourquoi les jeunes se sont révoltés à l’époque ! Heureusement qu’on est loin de cette époque où la télé publique était à genoux ! Mais je ne comprends pas pourquoi ils ont éprouvé le besoin de coloriser ce reportage… Et c’est alors qu’une chape de plomb m’est tombée dessus : ce n’était PAS une rediffusion ! Ce reportage risible a bien été réalisé cette année et il y est question du week-end des Macron ! En 1968, Cabu avait publié dans L’enragé un dessin où l’ORTF était représentée sous la forme d’un perroquet qui craquait au grand Charles : « T’es le plus grand, t’es le plus beau, as-tu bien déjeuné Charlot » : 50 ans plus tard… Sans commentaires.
Samedi 12 mai
10h10 : J’apprends la mort de Gérard Genette. Je me suis souvent référé à ses Palimpsestes pour mes recherches, notamment sur Albert Camus et même sur Raymond Calbuth : ça fait drôle, d’y penser, c’est comme si une partie de moi-même disparaissait, j’arrête là, ça ne me conduira qu’à enfiler les clichés comme des perles.
Dimanche 13 mai
15h : J’assiste à la répétition de Walls : la solution, un spectacle auquel j’ai modestement contribué en tant qu’auteur. J’avais notamment écrit les discours de deux politiciens démagogues et j’ai ainsi eu la surprise de constater que les deux rôles ont été confiés à des femmes : c’était probablement un hasard dû à la disponibilité des comédien(ne)s, mais le hasard fait bien les choses car, dans ces bouches féminines, c’est encore pire, encore plus effrayant… Mais que ça ne vous dissuade pas de venir voir la première représentation, le dimanche 20 mai à 16h, à l’entrée du pont Albert Louppe (le pont piéton de Plougastel) sur la rive de Plougastel-Daoulas.