Au XVIIIe siècle, un illusionniste comme Giussepe Pinetti ( 1750-1803) n'était pas encore considéré comme un artiste respecté... Le magicien lui-même jouait sur l’ambiguïté de ses dons. Ainsi Pinetti se présentait-il comme un homme de science. Il a commencé sa carrière comme professeur de physique ( ou de ''philosophie naturelle'') à Rome dans les années 1770, ses cours étaient agrémentés d’expériences, des ''illusions'' qu'il faisait passer pour des démonstrations scientifiques...
Durant l’hiver 1783, Pinetti présente ses ''expériences'' devant la famille royale à Fontainebleau. Il obtient alors l’autorisation exceptionnelle de les présenter au Théâtre des Menus Plaisirs du Roi. Pinetti a bénéficié aussi de l’appui du Duc de Chartres, cousin du Roi, maître du Grand Orient de France (Pinetti était lui-même franc-maçon). En Allemagne il a même utilisé les réseaux rosicruciens.
Cagliostro va se présenter comme un disciple du comte de Saint-Germain...
Ce dernier semble bien mystérieux, il apparaît en 1743 à Londres, où il est connu comme musicien et compositeur, et riche... Soupçonné d'espionnage l'homme disparaît pour Paris, il y tombe amoureux d' Élisabeth d’Alencée, alors qu'elle se marie avec le baron d'Ogny , puis on le trouve en Prusse (1749). En 1758, Le marquis de Marigny, directeur des Bâtiments du roi, l'autorise à s'installer dans le château de Chambord, alors inhabité, pour installer son laboratoire de teinture, et de fabrication de couleurs …
La favorite du roi Louis XV, la marquise de Pompadour (soeur de M. de Marigny), intriguée par ce mystérieux personnage dont son frère lui a tant parlé, l’introduit à la cour, persuadée qu’il aura tous les talents pour divertir le roi.
Le comte de Saint-Germain, est couvert de bijoux, et richement vêtu ... Il parle plusieurs langues, est érudit sur nombreuses disciplines ( une vraie encyclopédie …!). Parfait conteur, il aime relater des épisodes historiques, comme s'il les avait vécu au plus près … !
Moqueur, Voltaire écrit de lui : « C’est un homme qui ne meurt point et qui sait tout. » ( lettre du 15 avril 1760 à Frédéric II)
« Il me montra une quantité de gemmes et surtout des diamants de couleur, d’une grandeur et d’une perfection extraordinaires. Je crus voir les trésors d’Aladin, possesseur de la lampe merveilleuse ». Selon le baron Charles-Henri de Gleichen, diplomate danois en France, qui a publié dans Mercure étranger, Paris (1813), le récit des rencontres qu’il eut avec Saint-Germain.
« Jamais homme de sa sorte n’a eu ce talent d’exciter la curiosité et de manier la crédulité de ceux qui l’écoutaient. Il savait doser le merveilleux de ses récits, suivant la réceptibilité de son auditeur. Quand il racontait à une bête un fait du temps de Charles Quint, il lui confiait tout crûment qu’il y avait assisté, et quand il parlait à quelqu’un de moins crédule, il se contentait de peindre les petites circonstances, les mines et les gestes des interlocuteurs, jusqu’à la chambre et la place qu’ils occupaient, avec un détail et une vivacité qui faisaient l’impression d’entendre un homme qui y avait réellement été présent. Quelquefois, en rendant un discours de François 1er, ou de Henri VIII, il contrefaisait la distraction en disant : “Le roi se tourna vers moi”… il avalait promptement le moi et continuait avec la précipitation d’un homme qui s’est oublié, “vers le duc un tel.” » Témoignage du baron de Gleichen, lors d'une rencontre avec le comte de Saint-Germain en 1759 à Paris.
La vieille comtesse de Gercy, femme d'ambassadeur, affirme avoir croisé Saint-Germain à Venise, cinquante ans plus tôt, tout aussi jeune et fringuant.
Les rumeurs circulent sur son grand-âge, et sur des expériences qui lui permettraient de faire grossir des perles, ou de transmuter les métaux ...
Obligé de quitter la France ( espionnage pour le compte privé de Louis XV et agent ''double''…)...
Il part à Amsterdam pour y rétablir l'ordre des Templiers (!), puis il voyage en Prusse, Russie, Italie, Angleterre, et Autriche (où on le voit souvent à Vienne, au «quartier général des Rose-Croix») et échoue finalement à la cour du landgrave de Schleswig-Holstein, alchimiste fervent.
Dans la cellule romaine de Cagliostro, après sa mort fut découvert l’ouvrage hermétique intitulé ‘Très Sainte Trinosophie’, aujourd’hui conservé à la bibliothèque de Troyes et dont il n'existe qu'un exemplaire... Il serait attribué au comte de Saint-Germain ; à moins qu'il ne soit de Cagliostro … ?
Le docteur Eckert écrira en 1857 : « Les archives de la Franc-Maçonnerie prouvent que M. de Saint-Germain prit aussi part à la grande Conférence Maçonnique tenue en 1785 à Paris, où se trouvaient aussi Lavater, De Saint-Martin, Mesmer, Wöllner, De Gleichen et Cagliostro. »
La survivance des Templiers, qui intéresse particulièrement J.L. De la Bermondie, et Jean Sinclair, pouvait être un objectif du Comte de Saint-Germain : Rose+Croix, il était chargé de recruter de nouveaux membres pour la Stricte Observance Templière parmi la noblesse, alors qu'il fréquentait les Cours d’Europe. On cite une lettre adressée par Saint-Germain au comte Goërtz à Weimar ou il écrit : « J’ai promis une visite à Hanau pour rencontrer le Landgraf Karl afin de travailler avec lui au système de la Stricte Observance, régénération de l’Ordre des Francs-Maçons, dans l’esprit aristocratique, pour laquelle vous vous intéressez aussi si vivement ». Le prince Charles de Hesse, auprès duquel le Comte de Saint-Germain finira sa vie, était Grand Maître de la Stricte Observance.
Selon le témoignage du chevalier d'Oisemont, il s'agit à présent d'observer quelques tours de Cagliostro ...
A suivre ...