« Les « créas» sont des êtres à part.
L’idée me vient parfois qu’ils ne sont pas tout à fait humains. Je suis persuadé que l’entreprise possède une île dans le pacifique acquise pendant la deuxième guerre mondiale.
Des murs hauts la cernent. Un rayon de soleil ricoche parfois sur un viseur de fusil d’assaut. En s’approchant, on remarque le va-et-vient de gardes en tenue de camouflage. Ils s’arrêtent pour scruter la végétation en contrebas lorsqu’un bruit suspect attire leur attention.
Ces hommes ont des réflexes de tueurs surentraînés. L’armée a depuis longtemps perdu leur trace et leurs pensions ont été supprimées. Mais ils ne regrettent pas. Un compte en banque hébergé dans un paradis fiscal leur assurera une retraite confortable dans un lieu paradisiaque.
Ils ne savent pas pour qui ils travaillent mais cela importe peu finalement. Les seules personnes du continent qu’ils côtoient sont 3 infirmiers en blouse blanche immaculée. Eux-mêmes sont invariablement accompagnés de vagues silhouettes titubantes et cagoulées.
Les militaires ne pénètrent jamais dans le bâtiment moderne qui siège au centre de cette enceinte fortifiée. Ils ont l’interdiction formelle d’approcher à moins de 500 m d’ailleurs.
La raison évoquée par leur supérieur est que la vue d’une arme pourrait traumatiser les « patients ».
On serait pourtant tenté de se demander si les vitres opaques et les murs insonorisés ne suffiraient pas…
La « boite » aime prendre des précautions quand il est question d’un sujet où ne doit filtrer aucune information. Trop d’enjeux financiers en découlent. Surtout lorsqu’on pratique la manipulation génétique…
Derrière les murs, règne l’effusion.
Des savants hirsutes se pressent et se croisent dans de gigantesques couloirs en quête de la décoction miracle. Celle qui représente leur libération, leur billet de sortie pour la vraie vie, celle de laquelle on les a arraché pour leur connaissance scientifique exceptionnelle.
Les néons grésillent et pendent dangereusement par endroit. Les carreaux
sont dans le même état de délabrement et recouverts de d’étranges formules mathématiques ou chimiques.
Le clou du spectacle est une salle octogonale bardée de tuyaux fumants. Des incubateurs en forme d’ogive y sont disposés. Des symboles de danger de mort sont
placardés partout.
Toutes les 3 heures, métronomiquement, les incubateurs s’ouvrent dans un chuintement
morbide. De la vapeur dense s’échappe puis s’étiole. C’est alors que des formes humanoïdes s’extraient en claudiquant. Elles poussent un vagissement inarticulé qui ressemble néanmoins au mot qui
guidera leur vie à jamais : « MAR-KE-TIIIIINNNNNNG »
Tout cela pour vous décrire le sentiment d’irréalité que je ressens en la présence de nos « créas ». Ils sont des idées vivantes. Des imaginations personnifiées. Il n’y a aucune limite à leurs extrapolations. Et, au milieu de leurs délires ecstatiques ( !), de leur déblatération géniale, attende des mini-révolutions commerciales. Des sésames protéiformes instigateur du succès d’un produit, d’une marque ou d’une carrière.
Il suffit simplement d’avoir le bon décrypteur. »
Les « créas » vont jouer un rôle essentiel dans la réalisation du projet « green Wave », le restaurant de nouvelle génération.
Il vous paraisse sympathique ces êtres de l’imaginaire, ces doux rêveurs?
Moi je les adore.