Société secrètes

Publié le 19 janvier 2019 par Perceval

Il faut rappeler le contexte :

La monarchie de Juillet (1830-1848), proclamée le 9 août 1830 après les émeutes dites des « Trois Glorieuses », succède en France à la Restauration. Pour les légitimiste, le roi des français Louis-Philippe est un usurpateur …

C'est le temps des complots, des conspirations … Un temps où le mystère coïncident avec le succès du Romantisme... Un temps héroïque, ou diabolique … Que peut-on en dire … ?

Certaines révélations sont de notoriété publique. Ainsi, la ''charbonnerie'', après les échecs des premiers soulèvements militaires de 1820, plutôt bonapartistes, se réorganise...

Les chefs légitimistes et la duchesse de Berry, semble abandonner la conspiration. Des républicains choisissent l’action parlementaire, sinon sont en exil ou en prison. De nouvelles structures comme , les Familles (de sensibilité et de langage saint-simoniens), ou les Saisons, plus secrètes ( voir Buonarotti, l’héritier de Babeuf..) apparaissent.

« Les sociétés populaires, légalement interdites comme clubs, n’en étaient pas moins actives ni moins influentes ; soit de concert, soit par instinct, elles s’étaient divisées et multipliées pour ne pas courir toutes ensemble le même péril ; mais sous leur nom divers, les Amis du Peuple, les Amis de la Patrie, les Réclamants de Juillet, les Francs-Régénérés, la Société des condamnés politiques, la Société des Droits de l’Homme, la Société Gauloise, la Société de la liberté, de l’ordre et du progrès, n’étaient en réalité qu’une seule et même armée, animée du même esprit et marchant, sous la même impulsion, au même but » Guizot.

La ''Charbonnerie '' est une société secrète, répandue dans divers États européens pendant le premier tiers du XIXe siècle, particulièrement en Italie. Elle emprunte en grande partie à la franc-maçonnerie son symbolisme et son rituel initiatique. Le saint patron des Charbonniers, est saint Théobald... !

Le thème d'une ''force supérieure'' invisible qui tente de modifier profondément l'état existant en le tirant soit vers le Bien, soit vers le Mal, a toujours existé... Une nouvelle conception de l'Histoire, du fait de la Révolution, intègre la notion de ''Progrès'' … La société reste inégalitaire ; et l'égalité doit se cacher …

« (...) toute dissidence d’opinions, soit dans la foi, soit dans la politique, a dû se manifester en société secrète » George Sand

Sur la question religieuse, les sociétés secrètes qui fonctionnent sur le modèle maçonnique ( déiste ) , rejettent – le plus souvent – la religion établie … Néanmoins, le curé de Clichy, l’abbé Chatel, proposera une ''aumônerie'' à quelques uns de ces groupes ...

Plus-tard la société secrète blanquiste impose la renonciation à la totalité des rites maçonniques empruntés à la Charbonnerie, et prône l’indifférence métaphysique, tendant en pratique vers le matérialisme.


Alexandre Dumas, Balzac, Sue ou Victor-Hugo, ont intégré dans leurs romans, des faits qui relèvent de ces sociétés secrètes … Ferragus, de Balzac est le premier volet d’un cycle de trois récits consacrés à une société secrète extraordinairement puissante, les Treize...

Bien sûr, il n'est pas aisé de démêler ce qui se trame sous le couvert de ses nombreuses ''sociétés secrètes '' … Contemporaine, George Sand, elle-même a tenté de comprendre... En effet, Pierre Leroux lui a suggéré d'écrire une suite à Consuelo, en en faisant le roman des sociétés secrètes.... La romancière cherche à donner à son histoire la plus grande vraisemblance et rassemble pour cela toute la documentation disponible. Mais la tâche est difficile comme elle l’expose à son mentor dans une lettre de juin 1843 : « Vous ne savez pas dans quel labyrinthe vous m’avez fourrée avec vos francs-maçons et vos sociétés secrètes. C’est une mer d’incertitudes, un abîme de ténèbres. Il y a tant d’inconnu dans tout cela, que c’est une belle matière pour broder et inventer, et au fait, l’histoire de ces mystères ne pourra, je crois, jamais être faite que sous la forme d’un roman ». Lettre à P. Leroux, après le 15 juin 1843, dans George Sand , Correspondance, Paris, Garnier frères

La Comtesse de Rudolstadt,- ill de Maurice Sand

Dans La Comtesse de Rudolstadt, George Sand fait du Conseil suprême des Invisibles le maître d’un vaste réseau de sociétés secrètes, à l’insu des unes et des autres. Cette petite élite travaille à l’avènement du règne terrestre de l’Égalité en prêchant une religion nouvelle fondée sur « la formule mystérieuse et profonde » : Liberté, Égalité, Fraternité...

Comme l'explique L’initiateur des Invisibles à Consuelo, la religion de l’avenir est en lien étroit avec l’hérésie : « Nous sommes les héritiers des Johannites d’autrefois, les continuateurs ignorés, mystérieux et persévérants de Wickleff, de Jean Huss et de Luther »

La doctrine des Invisibles repose en effet sur une version primitive du christianisme, qui s’est perpétuée mystérieusement à travers les âges sous forme d’hérésies et de sectes, ou d'ordre comme les Templiers ...

George Sand s'est intéressée à la Stricte Observance fondée par le baron von Hundt (1722-1766) sur lequel elle interroge Ferdinand François ( voir correspondance)... Hunft a fondé en 1751 en Allemagne, en son château de Kittlitz, un nouveau système de hauts grades inspiré de l'Ordre du Temple et dirigé par des ''Supérieurs Inconnus '' … C'est là sans-doute où Consuelo ( une femme …) reçoit l’initiation... Cet Ordre du néo-Temple, se répand très vite et va attirer une douzaine de princes régnants... Goethe y a adhéré, ainsi que J G Fichte...

En France, la loge néo-templière des ''Chevaliers de la Croix'' accepte les femmes... La loge ''la clémente Amitié'' en 1840 et 1841, va initier trois femmes... Cette tentative de mixité va hélas avortée ...