Vous comprenez que les informations sur le XIXe s., que je vous résume, ne nous éloignent pas de notre histoire, celle de la quête de Charles-Louis de Chateauneuf, au contraire, c'est la partie objective, historique de l'aventure que vit le jeune limousin, sur la traces de ses prédécesseurs...
S'il poursuit Mme J, jusque dans ses escapades; c'est que - comme dans Ferragus de Balzac - Mme J. va conduire Charles-Louis aux portes d'une société secrète...
Les chevaliers du Nouveau Temple, est l'une d'entre ces sociétés, qui s'enracine dans un passé mythique et professe une espérance en rupture de la monarchie, et de l'Eglise : les deux pouvoirs qui ont pris l'énorme responsabilité de faire disparaître l'Ordre des Templiers...
Essayons de comprendre ce qu'il en est, en cette première moitié du XIXème siècle :
Le Mythe templier, reprend vigueur, même si le siècle a du mal à effacer cette ''légende noire'' savamment construite par la monarchie, Walter Scoot lui-même en reprend les stéréotypes … L'abbé Grégoire reconnaît qu'il émane de lui une force collective, qui le séduit ...
C'est d'abord au sein de la Franc-maçonnerie, et depuis les XVIIIe s. que l'ordre réapparaît.
En 1804 Bernard-Raymond Fabré-Palaprat devient grand maître de la loge maçonnique parisienne des Chevaliers de la Croix, affiliée au Grand Orient de France, en remplacement du docteur Jacques-Philippe Ledru, qui prétend avoir reçu les pouvoirs du dernier grand maître secret de l'Ordre du Temple...
C'est Fabré-Palaprat, qui produit un manuscrit latin daté de 1324, la Carta Transmissionis (ou charte Larménius du nom du premier successeur de Molay), qui porte les signatures des grands maîtres depuis la chute de l'Ordre, liste qui comprend entre autres, Bertrand Du Guesclin, Bernard VII d'Armagnac, le connétable Henri Ier de Montmorency, et le régent Philippe d'Orléans. En 1810, l'abbé Grégoire, dans son Histoire des sectes religieuses, se dit convaincu de l'authenticité de la Charte de Laménius
En Allemagne, Herder (1744-1803), poète, théologien et philosophe allemand. Ami et mentor du jeune Goethe, s'est attaché à réhabiliter les templiers. Ce disciple de Kant est considéré comme l'inspirateur du ''Sturm und Drang'' ( romantisme ..).. Adolf von Knigge, féru d'occultisme et d'alchimie est franc-maçon du rite de la Stricte Observance Templière. Ce rite revendique une filiation templière et domine la franc-maçonnerie allemande...
Au XIXe c'est l'histoire et la chute de l'Ordre du Temple, qui sont revues... La fameuse malédiction contre les rois de France proférée sur le bûcher en 1314 par Jacques de Molay -Grand Maître des Templiers – se manifeste à nouveau...
Notons, que la légende de cette malédiction existe dès la fin du XIVème, en pleine guerre de Cent Ans (1337–1453), certains soutiennent que Jeanne d'Arc l'évoque lors de son entrevue ( confidentielle ) de Chinon, avec le Dauphin, lui assurant qu'il n'en sera pas la victime …
Les Templiers sont bien là … !
Les sociétés secrètes également, et en particulier après 1848, les comités de solidarité de Ledru-Rollin, vont aussi s'organiser sur le même modèle : on parlera alors des sociétés des Mariannes ; particulièrement vivantes dans les milieux ruraux ( on va parler de franc-maçonnerie populaire …) … Dans la région de Clamecy, les Mariannes comptaient alors 300 "frères".
Comme curiosité, voici un '' Je vous salue Mari..'', alors que l'Eglise de France encense l'Empire après avoir accepter de saluer le coup d'état du 2 décembre 1851, par un Te-Deum dans les diocèses ..
« Je vous salue Marianne pleine de force, le peuple est avec toi, le fruit de tes entrailles, la République, est béni. Sainte Marianne mère du droit, aie pitié de nous ! Délivre-nous...
Vierge de la Liberté, délivre-nous des rois et des papes !
Vierge de l’Égalité, délivre-nous des aristocrates !
Vierge de la Fraternité, délivre-nous des soldats !
Vierge de la Justice, délivre-nous des juges !
Vive la République démocratique et sociale universelle !
Ainsi soit-il ! »
En février 1846, la revue littéraire La Revue des Deux Mondes publie un article de Théophile Gautier intitulé « Le Club des Haschischins ». Bien-sûr, l'article écrit dans un style ''gothique'', joue sur la parodie, même si le texte décrit un salon littéraire bien réel. Ce club fait référence à la première des sociétés secrètes, les Assassins, avec le système d’initiation de Hasan-i Sabbâh, il sous-tend leur lien avec les Templiers et l'échange de leurs connaissances … Dans ce club, où on explore également les propriétés du haschisch on peut rencontrer Alexandre Dumas, Victor Hugo, Eugène Delacroix, Gustave Flaubert, Gérard de Nerval, Baudelaire ...
On parle, également, d'adeptes du culte déiste et humanitaire "Théophilanthrope" inspiré du calvinisme et de la franc-maçonnerie qui exerce en l'église Saint-Sulpice de Paris, sous l'égide de Jean-Baptiste Chemin-Dupontés (1767-1850) - Loge " Isis-Montyon "…
Le lien, vers l'Eglise, peut se faire ici... Parmi les frères de la loge, on peut reconnaître la présence de l’Abbé Ferdinand Francis Chatel (1795-1857) qui y est entré en 1831 ; et fondateur de l’Eglise dite catholique française...
En effet, le grand maître de l'ordre du Temple se présente comme le successeur de Saint-Jean... Et, l'Eglise catholique Johannite ou Église Johannite des Chrétiens Primitifs, est dite Templière.
A suivre …