[LE FLEUVE S'ENTEND AU LOIN]
Nous respirons ensemble le fleuve s'entend au loin
un grand feu nous soulève
embrase les odeurs, le grain de la peau
la douceur des cheveux
son haleine
cette fois j'inventais les souvenirs
j'aspirais à grands poumons
qui a disparu ?
qui était là
juste avant
je ne sens plus rien
pas une respiration
J'écoute seulement
la rumeur
un flottement au-dessus
ville remplie d'arbres et d'allées
toutes les ombres sont effacées
je ne reconnais rien
au milieu
je refais le même rêve
un autre temps
se décline
que nous devons descendre
ou traverser
à nouveau
au bout du couloir
des formes humaines
des portes
nous descendons trop vite
notre vie presque à reculons
d'un claquement
tombe
doigts, pensées, muscles noués
bouche et yeux
nettoie par terre les sacs
éclatés
se perd
un peu de sang renversé ( balayé )
morceaux de kleenex ont déjà servi
plusieurs fois ramollis effilochés en bouillie
ces jours-là on les reprend au début
sortis des poches des sacs
écrasés
sous les talons
Petite passerelle entre nous
et ces mots sur un mur
Collés en pleine nuit
s'en aller est impossible
" À qui la vie humaine est une expérience à mener le plus loin possible "
Fabienne Courtade, Corps tranquille étendu, Flammarion, Collection Poésie/Flammarion dirigée par Yves di Manno, 2017, pp. 115-118. Couverture d'après une photo de l'auteur.