Le Comte de l'X. et Charles-Louis de Villeneuve, vont rencontrer un jeune homme qui - sorti de l’École Normale supérieure - est un germaniste passionné et passe de longs séjours en Allemagne : Guillaume-Alfred Heinrich, il enseignera plus tard la littérature allemande à la Faculté des Lettres de Lyon...
Voici son enseignement sur la légende du Saint-Graal ( édité ensuite en 1855) ...
Chez Wolfram, Parzival le héros, reste né dans le pays de Galles : son origine remonte aux vieux contes populaires de la race celtique, aux Mabinogion.
Le Mythe du Graal, vient tour à tour de la Bretagne, de la Provence ou de l'Orient.
Le Saint Graal, suivant les idées du moyen âge, n'était pas seulement un vase sacré, à jamais vénérable pour avoir reçu le sang du Christ; c'était aussi un vase mystérieux, source d'abondantes faveurs pour les chevaliers chargés de sa garde.
Ainsi le roi Pêcheur, Anfortas pour Wolfram, atteint d'une incurable blessure, ne prolonge ses jours que par la vue du Graal...
Heinrich, tient aussi à raconter – l'histoire du ''vase'' selon Les Mabinogion: rapportée par l'anglaise lady Charlotte Guest..
Un jour que Bran le Béni chassait en Irlande, il arriva sur le bord d'un lac nommé le ''lac du chaudron''. Comme il errait sur le rivage, il vit un homme noir, d'une taille gigantesque, au visage hideux, sortir tout à coup des eaux avec un chaudron dans ses bras. Une sorcière et un nain l'accompagnaient.
Le géant et la sorcière suivirent Bran le Béni dans la Cambrie son pays natal, et en retour de l'hospitalité qu'ils avaient reçue, lui firent présent de leur chaudron. Ce vase, comme le Graal, guérissait les blessures mortelles, il avait même le pouvoir de rendre la vie ; mais de peur que le ressuscité ne révélât le secret de sa guérison, il ne recouvrait point l'usage de la parole.
Nous retrouvons bien là le même mystère qui entoure le Graal...
Ce vase ne resta pas longtemps en la possession de Bran le Béni. Il avait eu quelques démêlés avec le prince d'Irlande Martolouc'h. Il se réconcilia avec lui et l'invita à un banquet. Il fit servir à manger dans le chaudron magique, où les mets ne s'épuisaient pas, et à la fin du repas il l'offrit au chef irlandais comme un gage de paix et d'amitié. Cette paix ne dura guère. De nouvelles injures forcent Bran le Béni à envahir l'Irlande.
Malheureusement le vase qu'il a donné devient le plus utile auxiliaire de ses ennemis; sa vertu ressuscite chaque soldat qui perd la vie, et Bran se consume en vains efforts pour vaincre une armée impérissable. Un jour enfin qu'on jette dans le chaudron la tête d'un chef pervers nommé l'Esprit-Mauvais, ce vase, qui, comme le Graal, ne saurait être touché par un méchant, se brise de lui-même au contact de cette tête coupable, et Bran le Béni recouvre ainsi l'avantage.
Le barde Taliésin parle déjà de son initiation aux mystères du chaudron, et une fois initié, s'écrie : « J'ai perdu la parole ; » allusion évidente à la discipline du secret destiné à dérober au vulgaire quelque enseignement religieux des bardes. Quant au vase lui-même, placé dans le sanctuaire d'une déesse, il communique le don de prophétie, l'inspiration poétique, et la connaissance des lois cachées qui régissent l'univers. L'introduction du christianisme chez les populations celtiques, en changeant les croyances, altéra cette vieille tradition dont le Mabinogi de Bran est peut-être un écho déjà bien affaibli. Mais un peuple est toujours porté à mêler ses vieilles superstitions à la doctrine nouvelle qu'il accepte. La légende du chaudron mystérieux se confond avec le dogme de la Résurrection, et sans doute avec celui de l'Eucharistie.
Guillaume-Alfred Heinrich, évoque ensuite Nicodème et la tradition chrétienne transcrite par Robert de Boron....
Robert de Boron, né en territoire de Belfort, est au service de Gautier de Montbéliard. Gautier, qui s’embarque pour la Croisade en 1201, et meurt en Terre sainte en 1212.
Heinrich nous dit encore, que l'abbé de la Rue ( 1751-1835. Historien et spécialiste de littérature anglo-normande), dans ses recherches sur les origines du cycle de la Table-Ronde, parle d'un vieux texte latin rédigé, dit-on , par les ordres du roi Arthur, et placé par lui dans les armoires de la cathédrale de Salisbury... ! ?
* Mais, le roi Arthur ; qui en parle … ?
Au XIIe siècle le moine Hélinand (Cistercien, chroniqueur de l'abbaye de Frémont dans le diocèse de Beauvais.) parle comme d'une chose universellement admise de la vision qu'un ermite breton eut en 720 « au sujet de Joseph d'Arimathie et du Gradal. »... Il n'a pu, dit-il, se procurer le récit original en latin déjà difficile à trouver de son temps ; mais il en existe des traductions françaises qu'il a consultées.
Un chroniqueur anglais du XIIe siècle, Guillaume de Malmesbury, écrit sur Arthur, un héros national gallois, contre les anglo-saxons, qui a livré maint combat avant de périr , en 542, à la bataille de Camlam... Sans autre fondement historique … !
Vers 850 dans le récit de Nennius ; la résistance des Gallois contre les Saxons se personnifie dans Arthur, et la victoire ne l'abandonne jamais... De plus, Arthur va à Jérusalem et en rapporte un modèle de la vraie Croix, destiné à rendre ses armées invincibles aux païens...
Enfin, la création épique du cycle d'Arthur s'achève dans la chronique de Geoffroy de Monmouth.