Claudine Galea, Les Choses comme elles sont par Jeanne Bastide

Publié le 25 mars 2019 par Angèle Paoli

I l est coutume de considérer Claudine Galea comme une dramaturge. Elle l'est, c'est sûr. Tout en écrivant des albums pour enfants et des romans pour adolescents. Auteure de théâtre, elle est aussi romancière. Depuis son premier roman : Jusqu'aux os (2003).

" Je n'écris pas des romans ou des pièces de théâtre, je n'écris pas pour les enfants ou pour les adultes, j'écris des livres ", dit-elle.

Claudine Galea est donc tout à la fois une auteure dramatique et une romancière : " L'écriture est ce qui me structure ", dit-elle. Les images arrivent, deviennent le corps des mots. " Je n'aime pas beaucoup les catégories qui enferment et scindent ", avoue-t-elle auprès des éditions L'Amourier.

Les Choses comme elles sont est un roman qui parle d'une enfant curieuse, singulière, qui va grandir sous nos yeux, dans un huis clos familial. Mais Les Choses comme elles sont, c'est d'abord un lieu : Marseille. Et surtout une écriture. Sensorielle et incisive. Une écriture brillante, céleste qui porte tout le livre.

" Ce que je cherche dans l'écriture c'est la peau des gestes, aller à l'extrême tactilité ".

C'est bien à un livre sur la transmission, l'héritage et la filiation que nous sommes conviés (on ne guérit jamais de son enfance) dans un quotidien empli de sensations, d'émotions, de troubles, de voix, de prescience peut-être. Une occasion pour l'auteure de recréer un monde à domestiquer, à conquérir, ou à pacifier ?

" Écrire, c'est donner de la mémoire aux souvenirs ", énonce Claudine Galea dans l'émission Par les temps qui courent (France Culture, 15 janvier 2019).

On l'aura compris, Les Choses comme elles sont s'apparente à un travail de mémoire. Nous n'avons jamais fini de naître de notre histoire. Il y a toujours ce qui se cache derrière l'apparence. Une traversée qui demande vigueur et énergie, car il y a nombre de " trous noirs " à traverser. À cet égard, une trouvaille que cette scène du père qui repeint un plafond d'une couleur bleu-nuit, faisant ainsi entrer le sombre et la nuit du ciel à l'intérieur de la maison. Nous n'avons jamais fini de repeindre le passé.

" La substance ne suffit pas, il faut aussi une enveloppe ", explique Matisse. C'est bien ce à quoi s'attache Claudine Galea dans ce roman. Un livre dans lequel le lecteur retrouve des voix qui se sont tues. Cela parle et nous parle. Cette ferveur contenue dans les petits gestes, nous la recevons.

Enfants, nous ignorions alors ces cris qui vont se loger en nous. Ces voix qui déchirent et ouvrent des sentiers obscurs. Ces voix qu'entend la narratrice de Claudine Galea et qu'elle nous restitue.

Les Choses comme elles sont, un roman qui frappe fort et nous touche.

Jeanne Bastide
pour Terres de femmes
D.R. Texte Jeanne Bastide