Schelling avait rejoint les critiques de Kant ( Träume eines Geistersehers) contre Swedenborg... Lui même avait alors écrit que les anges devaient être « les créatures les plus ennuyeuses de toutes»...
Puis, il eut ce choc émotionnel terrible: la mort prématurée de son épouse bien-aimée, Caroline - une intellectuelle de renom - en 1809, à l'âge de 46 ans.
L'intérêt de Schelling pour Swedenborg coïncide avec son travail de deuil. Sa curiosité pour l’autre monde est sans doute née principalement de son intense désir d’être avec l'être cher... Cependant Schelling cherche une philosophie étayée par des preuves expérimentales.
Schelling croit fermement en la communication avec le monde spirituel... L'éloge du mariage selon Swedenborg, lui parle … Si, à ses débuts, Schelling était assez éloigné de la notion d'immortalité individuelle ; Schelling envisage la notion de corporalité dans deux directions, matérielle et spirituelle. La mort est une transformation alchimique, un processus de purification, le passage d’un esprit incorporel à un corps spirituel... La mort est un processus naturel... La ''vraie mort'', la mort qui est la conséquence du péché, est la mort spirituelle, asservissement à la vie des sens physiques.
Morgen_im_Riesengebirge - C.D. Friedrich - détail''Clara'', ou ''Sur la liaison de la nature avec le monde des esprits'' traite de la question de la survivance de l’homme après la mort et, à travers celle-ci, celle de la relation entre le monde d’ici (ou celui de la nature) et le monde outretombe (ou celui des esprits) –, c’est aussi un ouvrage qui raconte une histoire, celle d’une âme endeuillée. Schelling vient de perdre son épouse Caroline (le 7 septembre 1809).
Je vous propose de faire connaissance avec une femme qui mérite notre intérêt : Caroline Schlegel -Schelling (1763-1809)...
Vu de l'Allemagne ( au XVIIIe s. elle n'existe pas, et signifie: même appartenance linguistique : l'allemand), le XVIIIe siècle, fut pour les femmes, une époque pleine de promesses : les '' Lumières '', et ce que l'on a appelé la '' république des lettres '' , sur un fond de révolution française, laissent poindre un nouvel espace de liberté; et avec le Romantisme de nouvelles relations entre homme et femme...
La maison Michaelis à GöttingenNous pouvons vivre les espoirs de cette époque avec Caroline Michaelis - Böhmer - Schlegel - Schelling (1763-1809)…
Caroline est la fille du professeur Michaelis, spécialisé en théologie et orientaliste reconnu, à Göttingen. Elle reçoit une éducation intellectuelle, et très tôt elle fréquente des familles d'intellectuels ( GE Lessing, GC Lichtenberg et JW Goethe.) et se lie d'amitié avec Thérèse Heyne et son futur mari, Georg Forster.
Silhouette de Caroline: jeune femmeLe 15 juin 1784, elle épouse son ami d'enfance, le docteur Bergarzt Wilhelm Böhmer, elle déménage avec lui à Clausthal et donne naissance à trois enfants. Le 28 avril 1785, nait son premier enfant, une fille : Auguste (Gustel) Böhmer. Des trois enfants qu'elle accouche, seule la fille aînée survit. Après seulement quatre ans de mariage, son mari meurt (1788).
Elle revient à Göttingen, et décide de ne pas se marier à nouveau et vivre seule avec sa fille.
À Göttingen, elle rencontre Georg Ernst Tatter (1757-1805), et tombe amoureuse de lui.
Tatter a étudié la théologie de 1776 à 1778 à Göttingen. ( comme plus tard : Hegel, Holderlin, Schelling : 1788-1793). Secrétaire de l'ambassadeur britannique, il accompagne – dans leurs études - à Göttingen, les trois fils du Roi George III...
Elle laisse encore Göttingen et vit pendant un certain temps avec son frère à Marburg, puis retour à l'automne 1791 à Göttingen où elle revoit Tatter. Après la mort de son père en 1791, et la maison familiale vendue, Caroline déménage à Mayence, où la visite Tatter en Septembre 1792.
Marburg du sud, 1842, avec une belle vue sur la vallée dont parlent Caroline et d'autresA Göttingen, Caroline se lie d’amitié avec le poète Gottfried August Burger et le critique August Wilhelm Schlegel.
Georg Forster (vers 1785)A Mayence, Caroline y retrouve son amie d'enfance, Thérèse Forster; et a une liaison tumultueuse avec Georg Forster...
Georg Adam Forster (1754 - mort le 10 janvier 1794 à Paris) est un naturaliste allemand qui fut également ethnologue, écrivain voyageur, journaliste et révolutionnaire. Il participe à la deuxième expédition autour du monde de James Cook...
Thérèse Forster avait donc épousé Georg Forster en 1785, l'avait suivi à Mayence en 1788. Elle tombe amoureuse de Ferdinand Huber, et selon les vœux de son mari, font ménage à trois... A la mort de son mari, elle épousera Huber qu'elle suivra à Stuttgart en 1798. Elle publiera plusieurs romans
Anne-Louis Girodet - détail (poèmes d'Ossian)L'armée révolutionnaire française du Général Custine (1740-1793) entre dans Mayence le 21 octobre 1792.
Caroline Schelling par Tischbein (1798)La ville, demande son rattachement à la France sous le nom de ''République de Mayence''. Caroline fréquente les milieux révolutionnaires...
Mais, après la reddition de la ville obtenue par les troupes prussiennes (1793), Caroline tente de s'échapper en voiture avec sa fille, mais elles sont arrêtées et conduites à la forteresse de Königstein. Elle se rend compte qu'elle est enceinte d'un jeune officier français de Custine : le lieutenant Jean-Baptiste Dubois-Crancé, neveu du général François-Ignace Ervoil d'Oyré, stationné à Mayence au début de 1793.. Après avoir refusé de donner l'enfant au père qui la réclame, elle reçoit l'aide de A. W. Schlegel qu'elle épousera en 1796, plus par reconnaissance que par amour... L'enfant, lui, meurt en bas-âge
Après sa libération, Caroline, se retrouve déclarée ''persona non grata'' dans toute une série de villes où elle ne peut donc plus séjourner.
August_Wilhelm_von_SchlegelElle épouse finalement August Wilhelm Schlegel (1767-1845) en 1796.
Schlegel, est un écrivain, poète, philosophe, critique, orientaliste et traducteur allemand et l'un des principaux théoriciens du mouvement romantique.
Schlegel a étudié à Hanovre, puis à Göttingen en 1786, où il a pour professeur, le père de Caroline.
En 1798, à Iéna, (Thuringe), où il est nommé professeur extraordinaire, il fait la connaissance de Goethe et de Schiller et fonde en mai avec son frère Friedrich une revue intitulée Athenäum.
Quand il sera séparé de sa femme en mai 1803, il deviendra, l'année suivante, l'amant de Germaine de Staël, séparée de Benjamin Constant... A suivre ...