Je me suis posée à côté, en retrait, pour regarder. Je voulais juste voir, je voulais juste entendre l’excitation crépiter en dehors de moi, et les gestes qui assaillaient le silence, et l’étrange beauté d’un ballet inconscient. Je voulais juste la regarder, elle.
J’aurais aussi bien pu être aveugle. Car c’était un autre langage que celui que je contemplais. Il y avait un mystère dans son sourire, un monde de sens inconnus dont je n’étais pas la destinataire. Il y avait tout ce qui constituait frontière, depuis l’origine.
J’ai regardé quand même. Ce n’était pas grave, de ne pas comprendre, ce n’était pas grave d’être témoin sans participation ni possible ni désirée. Je ne savais pas où était la joie de l’instant, pourtant il y en avait une. Je la savourais de ma place. Je la goûtais comme une voleuse, je m’y abreuvais comme on se noie. Je voulais juste observer.
Et ne pas toucher. Et n’être rien d’autre que ce regard inerte.
C’était une petite mort, au fond, l’avant-goût de la disparition. Lorsque la conscience affleure encore en surface mais ne construit plus rien. Il fallait simplement que j’ouvre les yeux pour la regarder, elle, sans qu’elle le sache. Mais je crois qu’elle le savait. Et je crois que cette idée lui plaisait.
Nous étions deux, pourtant le monde existait sans nous.