Greta Thunberg et le CETA le même jour à l’Assemblée Nationale : l’obscénité de nos politiques.

Publié le 24 juillet 2019 par Legraoully @LeGraoullyOff

Que dire de l’intervention d’hier de Greta Thunberg à l’assemblée Nationale ?
Invitée par un collectif parlementaire transpartisant « accélérons la transition écologique et solidaire », avec en grand organisateur le député ex marcheur Mathieu Orphelin, qui a mis les petits plats végans dans les grands, la nouvelle égérie de la lutte contre le réchauffement climatique a livré un discours solennel de plus de 10 minutes aux députés présents.

Une lecture du dernier rapport du GIEC pour les nuls :

Si l’on devait résumer son discours, il se résumera facilement à une lecture synthétique du dernier rapport du GIEC (Groupe d’Experts Intergouvernemental sur l’Evolution du Climat), où la jeune militante a martelé sans cesse le décompte des dernières gigatonnes de CO2 encore déversable dans l’atmosphère avant un basculement irrémédiable dans l’incontrôlable, parlant de « prendre la mesure du budget carbone » .

Rien à redire à cela. De plus, elle interpelle également les députés sur leur « maturité » probablement insuffisante à entendre ces chiffres, et rappelle que le pire « n’est pas l’inaction », mais « quand les entreprises, les politiques font semblant d’agir, alors que rien n’est fait, sauf de belles campagnes de presse » (sic). Applaudissements d’approbation des députés.

Un discours simple, limpide, consensuel. Tout nos législateurs applaudissent.
Enfin la grande alliance du militantisme écologique et du pouvoir politique.

Verrait-on enfin le bout du tunnel qu’est cette crise écologique inédite ?

Le CETA est passé par là.

Il y a quand même quelque chose qui cloche.
Le jour même de l’intervention de Greta Thunberg à l’assemblée nationale, et plus précisément juste après son intervention, les députés ont été appelé à voter sur la ratification du CETA (Comprehensive Economic and Trade Agreement), ce fameux projet de « libre échange » avec le Canada, dont le côté climaticide est absolument évident.

Au menu du CETA : un dumping écologique massif à travers la levée de barrière douanières pour importer massivement des denrées agricole jusqu’alors interdites à l’import. La viande canadienne produite massivement aux hormones dans des fermes usines, aux OGM et nourrie aux tourteaux de soja génétiquement modifié, va envahir nos étals de supermarché.

Non content de mettre nos agriculteurs dans un concurrence déloyale (puisque interdit de produire dans de tels conditions) à travers un dumping écologique qui casse les coûts, le CETA va faire sillonner massivement toutes sortes de cargos sur les mers, rejetant encore plus toutes ces fameuses tonnes de CO2 si chères à Greta Thunberg.
La santé des consommateurs va évidemment en pâtir, tout comme l’environnement toujours plus trafiqué, et incité à être trafiqué sur nos rives pour s’aligner à la concurrence.

Le CETA est donc bien l’ennemi de la consommation locale, et donc l’accélérateur à émission de CO2.
A cela, nous pouvons rajouter (sans faire de prosélytisme végétaliste) que la  consommation de viande est un vecteur extrêmement important d’émission de CO2 et de méthane (hautement nuisible en effet de serre). C’est également un très important vecteur de consommation d’eau (en cette période de canicule et de sècheresse, ça doit nous parler)…

Le CETA faisant la promotion indirectement de la consommation de viande (à travers une politique d’abaissement de son coût), celui-ci joue doublement un très vilain tour au climat, puisqu’il incite à une consommation de viande, elle même extrêmement lourde en impact carbone, de par sa production mais aussi son transport longue distance, à l’heure tout le monde (ou presque) s’accorde sur l’importance de modérer la consommation carné et de consommer local.

Greta Thunberg est bien venue s’exprimer à l’Assemblé Nationale sur l’écologie, mais la vraie info du jour pour le climat, c’est cela :

Le CETA est adopté :

Nombre de votants : 553
Suffrages exprimés : 479

POUR : 266
CONTRE : 213

52 députés LREM se sont abstenus, et 9 ont même voté contre (mais pas nos députés locaux messieurs Lioger, Mendès et Belhaddad, qui ont voté pour comme un seul homme).

Et Greta dans tout cela ?

Greta Thunberg pouvait-elle ignorer l’imminence du vote sur le CETA ?
Pouvait-elle ignorer la grave menace climaticide portée par ce projet de traité ?
Pouvait-elle ignorer tout les appels à renoncer à celui ci hurlés par ces détracteurs ?
Pouvait-elle simplement ignorer l’appel de Nicolas Hulot, ancien ministre de l’Ecologie, à avoir le courage de renoncer au CETA ?

On ignore ce qu’elle savait réellement à ce sujet. La seule chose sûre, c’est qu’il n’y a pas eu un seul mot de Greta Thunberg à l’adresse des députés à ce sujet.

Greta Thunberg passe un savon à des députés bien contents de laver leurs consciences écologique.

A quoi a donc à alors rimé cette intervention de Greta Thunberg à l’Assemblée Nationale ?

Son exhortation à « agir » était aussi importante qu’elle ne renvoyait à strictement rien de concret.
Son intervention obstinément apolitique lui ouvre certes les portes des puissants pour s’exprimer, mais force est de constater que ses interventions sont aussi efficaces à faire bouger les décideurs politiques qu’un frigo pour faire cuire une pizza.

Il y avait bien un côté moral à son intervention. Elle a sermonné des députés « peut être pas assez mûr » pour comprendre et agir.

C’est sûr que cette gamine à mis un sacré savon à ces députés.
Mais un savon qui ne renvoi à rien, qui n’assume strictement aucune position politique, et qui ne demande strictement rien de concret.

Par contre, un savon bien utile pour ces députés bien heureux de se nettoyer la conscience écologique, salit par les moult renoncement écologiques que je ne m’efforcerais pas ici de détailler tellement ils sont nombreux et dramatiques.

Voilà la sinistre lecture de l’intervention de Grata Thunberg à l’Assemblée Nationale :
Un beau discours consensuel devant les députés, des applaudissement, une tape dans le dos de la jeune écologiste, puis une bonne bouffe à la cantine de l’Assemblée avant d’aller voter le crassement du monde la ratification d’un CETA climaticide, hypothéquant encore plus l’avenir des enfants comme Greta.

Alors, si nous pouvons lui reconnaitre le courage du discours et de la mobilisation, même si elle est apolitique, à quoi cela sert-il vraiment ?

C’est elle (a priori) qui porte le choix de s’adresser aux politiques. Alors à quoi cela sert-il de s’adresser aux politiques si ça n’est pas pour parler politique ?

Certain diront que ça n’est encore qu’une enfant.
D’accord. Mais c’est quand même elle qui parle de « défaut de maturité » chez les politiques. Donc l’excuse de la candeur ne pourrait alors malheureusement pas être retenue.

Finalement, ne faut il pas prendre Greta Thunberg pour ce qu’elle est ? une enfant ?

Loin de moi l’idée de lui faire un procès. Elle crois probablement très fort en ce qu’elle fait. Et elle est effectivement une enfant. Le monde impitoyable de la politique et du complexe industrio-financier la dépasse très certainement.
D’ailleurs, force est de constater que son discours s’arrête là où commence le business.

Donc il serait probablement plus juste d’apprécier Greta pour ce qu’elle est : une enfant, inquiète, comme des centaines de millions d’autres, et à juste titre, et qu’il faut écouter, respecter, avec qui il faut dialoguer.

Le vrai problème, ça n’est pas elle, c’est ce qu’on fait d’elle : une égérie, un symbole, mit à toutes les sauces, sauf celle d’un réel changement de paradigme.

Dans cette affaire, la seule leçon qui émane réellement, c’est l’exploitation éhontée, cette opération de communication obscène, que font nos décideurs accueillant cette gamine le jour même où ils vont mettre un coup de couteau de plus dans le dos du climat (et des enfants) pour la sacro-sainte loi du « toujours plus de profits ».

Greta Thunberg ne peut être tenue pour responsable de son utilisation abjecte à des fins de greenwashing.
Son instrumentalisation par les politiques est d’un mépris total. Pour nous, pour la planète, mais aussi et surtout pour elle.

D’ailleurs, si des députés RN et LR ont refusé de la voir avec des idées et arguments absolument nauséabonds, au moins ont-il le mérite d’une forme de cohérence.

Greta Thunberg est une enfant. Ni plus, ni moins.

Et si un jour, elle s’avise en grandissant d’être une réelle activiste, si elle décide de poser ses valises à Bure par exemple, ou si elle décide de se construire une cabane sur une des nombreuses ZAD, en cours ou à venir, alors là, ceux qui l’ont applaudit hier n’hésiteront pas à lui envoyer matraques, LDB et lacrymo.
Et alors, là, on pourra reparler d’elle. Et l’affaire sera passionnante.

Metz, le 24 juillet 2019

Vincent FELIX