Récemment, j’ai, par inadvertance, entendu la conversation de deux Indiennes d’un certain âge. La première rentrait tout juste de quarante ans aux États-Unis et la deuxième avait un fils qui y vivait et qui lui demandait instamment de le rejoindre.
- La première : Comme je suis contente d’être rentrée ! D’ailleurs, vous savez ce qui m’a le plus manqué là-bas ?
- La première (sans laisser à l’autre le temps de répondre) : Les domestiques !!
- La deuxième : Ah ben je veux bien vous croire ! D’ailleurs c’est surtout pour ça que je ne veux pas y aller. Ici j’ai deux personnes à temps plein chez moi, je ferais comment moi là-bas ?
Un peu estomaquée je fus. Que leur cercle social, leur famille leur manque, okay. Mais leurs femmes de ménages ? C’est
Le plus paradoxal dans cette histoire, c’est le comportement de ces maîtresses de maison avec celles dont elles ne peuvent apparemment pas se passer. Elles les payent le minimum (entre 100 et 300€) quitte à parfois aller les chercher mal dégrossies (texto) dans des villages, leur donnent 2 jours de congé par mois, et les traitent comme si elles étaient invisibles (au mieux) ou des esclaves (au pire). Elles s’étonnent ensuite de la rotation du personnel qui ne reste guère chez elles. C’est peut-être moins vrai à la campagne, ou dans la classe moyenne, mais c’est assez flagrant dans la société aisée urbaine, qui ne sait plus à quel saint se vouer pour se faire apporter son verre d’eau en paix.
Quant aux employeuses, elles ont leur conscience tranquille : elles créent de l'emploi, offrent des opportunités, et n'ont souvent pas grand-chose en retour : les femmes de ménage mettent rarement du coeur à l'ouvrage, parfois volent et rentrent à leur village (où vit leur famille) à la moindre occasion, les laissant dans la panade pile quand elles ont besoin d'elles pour préparer le thé aux invités.
Il y a d’ailleurs des petits malins qui ont pensé à monter des agences de maids. Et la plupart sont de vrais filous. Les employées travaillent correctement un mois, le temps que l’agence touche sa com, et puis ça devient n’importe quoi. Une tâche non aisée donc, de gérer du personnel de maison en Inde. D’autant que faire la poussière quotidiennement est nécessaire, que la cuisine (indienne) prend un temps non négligeable, et qu’on préfère envoyer le chauffeur chercher les enfants à l’école plutôt que de passer soi-même deux heures dans les bouchons.
Les besoins en aide sont donc certainement plus élevés en Inde qu’en Europe ou aux États-Unis, et couplés, bien heureusement, avec une main d’œuvre encore bon marché. Mais si devoir faire son lit le matin est le prix à payer pour respirer un air qui n’a pas 286 μg/m3 de PM10 (contre une moyenne mondiale de 71, et ça c'était en 2010), ça vaut quand même le coup d’y réfléchir !
Un livre sur le sujet : Maid in India