C’est un format que j'aime et une couverture invitante.
Les Foley, c’est Annie-Claude Thériault que j’ai connue sur Le Bateau-Livre de 2017. J’avais lu La fille de l’Allemand, elle voulait lire mes Têtes rousses. Parce que l’Irlande justement. Elle voulait déjà en parler. C’était déjà Les Foley.
C’est une histoire qui commence à Micsou, au Nouveau-Brunswick en 2019 et qui se termine au même endroit.
C’est l’Irlande. Pas vraiment l’Irlande le pays, quoique oui aussi, mais un portait de cinq femmes, de mère en fille.
Les Foley, c'est une plante, la Sarracenia purpurea, prétexte génial et lien entre les générations :
« Parce qu’au-delà de la Sarracenia purpurea, c’était quelque chose de ma mère que je souhaitais retrouver. N’importe quoi.Plus encore que la plante, Les Foley, c’est aussi un coléoptère, un doryphore.
Mais au moins un sillon. »
« un minuscule insecte beige, éclatant. Beige, scintillant. Beige presque orange. Avec des lignes noires sur le dos. »Un doryphore que je connais bien puisque, là où je vis, je suis entourée de champs de pommes de terre. Comme mon ancêtre Bridget Bushell. Comme Evelyne Foley.
Un doryphore qui représente « la guigne » pour Evelyne Foley, cette grand-mère qui fera partir fils et petits-fils en Amérique. En 1847. Parce que la famine, la misère, la mort, la « guigne ». Elle aurait voulu que sa petite-fille parte elle aussi, mais cette petite ne veut quitter ni tantes, ni grand-mère ni l’Irlande.
Les Foley, ce sera ensuite le Nouveau-Brunswick, l’Acadie, l’histoire d’Evangéline. Mais aussi les pères absents, les hommes violents. La cruauté de la vie. Les enfances blessées.
Les Foley, cinq générations, cinq descendantes qui cuisinent le stew et le caramel pendant que les pères et les frères boivent du whisky. Beaucoup d'odeurs et de couleurs dans Les Foley.
Les Foley, c’est encore plus un style tout à fait contemporain dans la répétition des mots, le martèlement des phrases courtes, des phrases sans verbe ou seulement un verbe. L'atmosphère qui en résulte « évoque Emily Dickinson ou les sœurs Brontë » selon la journaliste Manon Dumais dans Le Devoir.
Et puis, toujours il y a les mères, les femmes, le manque.
« Je me suis levée complètement obsédée arc cette Clara qui connaissait ma mère. C’était clairement ce que j’avais espéré en venant ici : retrouver quelque chose d’elle. Une trace. Un nom. Mon récit. Son sillon. Je ne sais pas. Elle ne m’avait rien laissé, ma mère, ni d’elle, ni de son histoire, ni de mes grands-parents. »Et Laura apprendre l’histoire des femmes Foley. Elle aura trouvé son rivage. « C’était un accostage ».
Une fois le livre refermé, je pars marcher sur le chemin bordé de champs de pommes de terre. Temps de la récolte, temps des rouges et des orangés si beaux si forts cette année. Très peu de doryphores cette année.
Les Foley m’ont rappelé tous ces Irlandais venus en Amérique pour vivre mieux, pour ne pas disparaître. Qui, comme moi, veulent laisser des sillons.