(Notes d’hosto XIII)
38. Le 4 décembre dernier, donc le lendemain de mon admission aux urgences de l’hosto, j’avais écrit ce premier message au plus négro de mes amis, le prénommé Bona, Congolais artiste et de surcroît auteur de plusieurs livres, que j’avais rencontré d’abord sur la Toile (nos blogs) et ensuite en 3D à Sheffield : « Carissimo, pardon de te laisser sans nouvelles mais ces derniers temps ont été plombés par un énorme fatigue et de plus en plus de peine à marcher , à quoi se sont ajouté des peines de cœur de chatte peu congolaise vu que c’est le serpent Infarctus qui a mordu. Je t’écris ce soir de l’hosto au lendemain de subtiles manipulations angioplastiques. J’y ai gagné deux stents, un troisième est prévu bientôt et le traitement au Karcher de l’artère fémorale de ma jambe droite, rien donc de bien méchant, comme tu vois », et Bona m’avait répondu : « Ô ma blanquette , tu m'en vois tout peiné. Ah mais que ce serpent aille agiter sa queue ailleurs, ouste ! Dis-lui qu'il n'est pas chez lui. Foi de sorcier congolais! Nappe de paix sur tes coronaires et sur ta jambe droite. Et par dessus tout, amitié chaleureuse, vive, douce, quasi christique à la veille de sa énième naissance au monde ! Marie-Claire rentre après-demain de Kinshasa. Elle t'enverra ses meilleures pensées et moi je t'embrasse très fort, ainsi que Lady L. et la petite smala qui veille sur toi ».
38. Avec un Juif errant dans une poche, et une paire de Congolais dans l’autre (sans oublier leur fils Parfait), le serpent du Mal n’a qu’à bien se tenir, me suis-je dit les jours suivants, sans prévoir qu’aujourd’hui le Mal mute, et dans les hostos les plus sophistiqués plus que dans les dispensaires de brousse, avec ce que les sorciers blancs appellent l’Infection nosocomiale, et c’était parti pour une semaine de plus sous antibiotique et quelques messages hilarants échangés avec Michael et Bona pour soutenir le moral du cardiopathe en butte à la Bactérie…
39. Enfin la fidélité si chaleureuse de Bona a trouvé son pendant à la télé, l’autre soir, dans ce docu évoquant une infirmière blanche spécialisée en soins de chimpanzés, qui revenait au bord du fleuve Congo deux ans après y avoir soigné une petite bande de nos frères simiesques dans laquelle se trouvait une certaine Koulia. Et donc voici notre soignante descendant toute gironde de la grande pirogue pour s’enfoncer dans la jungle jusqu’à une certaine clairière, et la voilà qui appelle « Koulia, Koulia, Koulia ! », sur quoi la canopée se met à bouger, à bruisser et, miracle d’apparition, Koulia de tomber de là-haut droit dans les bras de sa soeur humaine...
Peinture: Bona Mangangu, Fleur de volcan. Pp. JLK