Les Indiens sont traditionnellement peu pollueurs et très recycleurs – et la vieille génération l’est encore, les personnes âgées ayant moins d’une poubelle par semaine. Mais les générations actuelles ont découvert la consommation et le plastique, et ils en raffolent.
Et comme ils n’ont pas une attitude très citoyenne quant il s’agit de balancer des ordures – ils gardent leurs intérieurs propres mais dans les extérieurs, c’est le laisser-aller complet, « puisque tout le monde le fait » ils auraient tort de se priver. Résultat, il y a des ordures partout, et un gros paquet de plastique. Et c’est à pleurer.
Le Gouvernement essaye bien de se mêler d’interdire le plastique à usage unique. Objectif : plus de plastique à usage unique d’ici 2022. Sauf que cet interdit national d’utilisation de plastique à usage unique, annoncé le 15 août 2019 et qui devait entrer en vigueur le 2 octobre (en mémoire à Gandhi dont c’est l’anniversaire) a été mis de côté pour l’instant. D’abord, cette interdiction n’est pas très clair (il n’y a par exemple pas vraiment proposé de définition des plastiques à usage unique) et puis surtout cette mesure est impopulaire auprès des lobbys industriels. Modi a gardé la face en expliquant qu’il préférait que le mouvement vienne de la population. Ne rigole pas, ce n’est pas impossible. Certains citoyens nettoient des plages eux-mêmes (comme Afroz Shah à Mumbai, d’autres des lacs. Voici d’ailleurs tout un tas d’initiatives individuelles dans la bataille contre le plastique: ici). Cela suffira-t-il ?
Les tortues seraient revenues à Versova beach
Il faut quand même savoir que le Sikkim a déjà mis en place cette mesure en 1998, le Maharashtra en 2018 ; en fait 25 des 29 États indiens ont déjà interdit les sacs plastiques. Avec plus ou moins de succès. C’est-à-dire que c’est comme tout, interdire c’est bien, mais s’assurer que la loi est respectée c’est mieux. Et là, le bât blesse. En même temps, avec tellement de gens…
Certaines industries s’y plient avec bonne volonté, saisissant une opportunité marketing : la plupart des hôtels cinq étoiles sont en train de retirer leurs bouteilles plastiques au profit d’eau purifiée qu’ils embouteillent sur place (en espérant que cette eau ne soit pas infestée). J’imagine que les économies d’eau en bouteille plastique sont non négligeables, même s’il va falloir payer des gens pour embouteiller l’eau sur place.
J’ai aussi posé la question à un industriel laitier : que faire des pochons de lait ? Question difficile, car ils ont permis dans les années (révolution blanche) à ce chaque Indien ait accès au lait, de manière plus hygiénique que via la consigne. Or on ne touche pas au lait, liquide sacré s’il en est en Inde. Par exemple, les pochons de lait sont une exception à l’interdiction du plastique à usage unique dans le Maharashtra, même si les industriels laitiers sont encouragés à trouver des solutions.
Mais ce n’est pas si simple. Comment garantir des conditions d’hygiène respectables dans un pays tropical (où il fait chaud, humide et où les insectes pullulent) sans emballage ? Oui on trouve beaucoup de vrac en Inde, surtout du riz, mais il n’est plus végétarien quand tu l’achètes. Une problématique qui a certainement des solutions mais sur laquelle il faut se pencher sérieusement.