J'ai depuis mon plus jeune âge pris fait et cause pour les Irlandais. Bien sûr, leur maillot vert se salit vite au Rugby, ils sont mauvais et teigneux, mais voila. Pourtant j'adore des Anglais, mais l'Irlande du nord, faut pas déconner. Je me souviens, j'étais alors bien jeune, d'avoir pleuré en apprennant la mort de Bobby Sands dans les geoles de sa très gracieuse Majesté . Anarchiste, je trouvais du talent à ces poseurs de bombes, à ces désespérados des landes, qui luttaient encore et toujours pour leur indépendance. Par nationalisme. Je n'étais pas à un paradoxe près à l'époque. Miroir de civilisation. Je me sentais davantage en empathie avec eux qu'avec certains peuples, sur le reste du globe, qui luttaient pour les mêmes raisons mais qui m'étaient alors inconnus ou trop étrangers. Et puis je ne savais pas que cette vieille ganache de Déon y avait fait son trou.
Les hymnes m'émeuvent. Toujours. Je me souviens de fredonner le 8e couplet de la Marseillaise, celui qui fut rajouté, alors que je marchais, sac au dos, casque en tête et fusil d'assaut en bandoulière, sur les chemins rocailleux de l'armée. Nous entonnions aussi, parfois, à deux voix, le Rule Britannia, avec Yves. La puissance des mots qui transporte les corps. Les pieds endoloris n'avaient plus la moindre importance. Nous étions vivants.
Sunday, Bloody Sunday est un hymne. U2 est un groupe d'hymnes. Un groupe de stade et d'emportements. Bien sûr, Bono est insupportable avec son côté donneur de leçons. Mais il a écrit de meilleures chansons que Philippe Val.
Ca m'a toujours surpris : U2, c'est archétype de ce que je devrais détester: un gros son pataud estampillé années 80, un chanteur à vocalises, le bassiste le plus navrant depuis l'invention de l'instrument. Mais foutez moi "Sunday, Bloody Sunday", "New Year's Day" ou "Where the streets have no name" et je me mets à me trémousser de manière irrépressible. Prenant enfin toute la mesure de cette maladie et décidant de la soigner, je viens de commander "War" de U2 sur Marketplace. A 4 euros, pas de quoi se priver. Bien entendu, le lien entre le titre de l'album et ma passion n'aura échappé à personne. Mais ça aussi j'assume. Enfin.