[DE L'AUTRE CÔTÉ DE LA NUIT] e l'autre côté de la nuit c'est comme Adeline Baldacchino,
D
le revers invisible d'une île au petit matin
la mer l'entoure et tu ne vois que la côte
sous le vent que ses flancs dénudés
son âme mise à nu tandis que son corps
défendu se dérobe
et tu descends longtemps parmi les pins
tu dois descendre plus bas pour
atteindre la plage où l'on se délivre
des premières énigmes
et le grand nuage liquide
de la mer y dévoile enfin son secret.
Je sais que tu sais que l'on sait
qu'ailleurs dans le monde à deux pas
peut-être même derrière la porte
à côté de la nôtre - et l'âne qui braie
s'en moque éperdument -
l'on meurt je sais que tu sais
qu'on passe notre temps sur la terre
entre deux instants de cristal
appontés l'un à l'autre malgré
leurs échardes de diamant noir
qu'on est venu qu'on repartira qu'il est
juste l'heure de s'aimer.
De l'étoffe dont sont tissés les nuages, Carnets grecs, éditions L'Ail des ours, Collection Grand Ours/ n°2, 2020, pp. 26-27.