Comme il me manque ton regard, celui qu’avec tant d’indulgence, tu portais sur moi…Comme elle me manque ta présence, même loin de moi quand tu t’en allais, je savais où tu étais… Aujourd’hui, je dois me satisfaire de celle qu’à jamais tu as dans mon cœur…
Qu’il me manquent ces yeux où je plongeais chercher de quoi me rassurer…
Les yeux sont l’entrebâillement de l’âme, eux seuls disent la vérité, tandis que le reste du corps réussi à se travestir, ils pénètrent au plus profond de l’autre pour percevoir son authenticité.
Et c’est ce regard qui nous construit ou nous détruit selon son degré de bienveillance ou de méchanceté. Le tien n’a cessé de me faire grandir, et sans lui maintenant je me dois de continuer à progresser.
Les regards que nous portions l’un sur l’autre tricotaient notre amour, ils se croisaient et se comprenaient à mi-mot, ou dans le soupir d’une connivence…
Et pourtant aujourd’hui, et plus encore dans ce curieux silence qui s’est emparé du monde en un instant, je t’entends… Ta voix, tes mots, mutiques et néanmoins limpides, me parviennent toujours, tu ris toujours de mes sottises, tu m’encourages quand je m’acharne à vouloir bien faire, tu te moques, ça te faisait toujours sourire, ma bouche entrouverte quand je maquillais mes cils ! Devant mon miroir je te soupçonne debout derrière moi, avec tes yeux rieurs et ton air faussement incrédule !
Aussi cruel soit ton départ de cette terre, aussi profond soit mon chagrin, je ne te sens pas si loin d’ici, en m’en faisant la confidence tu m’as donné de jolis devoirs de vacances, ils ne sont pas trop exigeants, il me faut juste apprendre à t’aimer autrement, chaque jour je dois relire notre histoire et me réjouir que nous en ayons été les interprètes, je fais des exercices de petits bonheurs quotidiens, mon regard à moi s’est aiguisé sur les larmes que j’ai versé, mes yeux sont grands ouverts sur l’avenir, j’épuise chaque jour de toutes mes forces, je ne voudrais à aucun prix te décevoir, tu n’auras rien à corriger, tu verras…
» Il avait des yeux où il faisait si bon vivre que je n’ai jamais su où aller depuis. » de Romain GARY ( Adapté : mis au masculin…)