J’ai vu passer le lent cortège
des âmes aux lèvres grises,
j'étais avec elles et sans elles:
je portais des valises
pleines de mes diverses vies;
je regardais le défilé
des foules aux longs visages
passant et bientôt dépassés
par leurs ombres sans âge...
Immobile je me tenais
aux mains déjà tenues
des vivants qui ne l’étaient plus,
que je reconnaissais
sans parvenir à les nommer
tant ils étaient les mêmes,
tant ils étaient sous tant de masques,
tant ils me fuyaient du regard...
Ne nous oublie jamais,
jeunesse a jamais fantasque
semblaient chanter en litanie
affligée et très pure
leurs voix comme sorties des murs
de mon rêve éveillé -
n’oublie jamais ta douce enfance,
ta mortelle innocence...
(Peinture: Robert Indermaur)