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Les élastiques…

Publié le 14 juillet 2020 par Ivanoff @ivanoff

Ça y’est ! Je les ai trouvés… Les vieux élastiques desséchés… (CF Madame POTIER sur ce même blog…)

Ils m’attendaient patiemment au fond d’un tiroir de ma cuisine… Jusqu’ici je les croyais toujours bien loin d’ici, chez quelque nonagénaire prévoyante, vous savez toutes ces choses qu’on garde « au cas où » et qui ne servent jamais, soit parce qu’on a oublié qu’on les possédait, soit qu’on en ait acheté d’autres qui tôt ou tard prendront la relève de tous ces trucs inutiles…

Ainsi me voici « rendue » … Serais-je à ce point moi qui pourtant jusqu’ici ne me sentais pas si « vieille » ?…

Alors, le voici venu ce temps où tout « fout le camp » !…

D’abord, vous autres qui plus ou moins discrètement passez la porte et me laissez à la nostalgie d’un temps qui n’est plus. Ma famille, mes proches, bien sûr, qui année après année manquez de plus en plus à l’appel, vous autres partis pour je ne sais quel ailleurs d’où vous ne répondez plus qu’aux abonnés absents… Et puis tout cette trame de coton qui colore chaque génération, de chansons, de bouquins, toutes ces connaissances « abstraites » que sont les « célébrités » qui elles non plus n’échappent pas à l’Horloge universelle et passent l’arme à gauche en abandonnant nos émotions au rang des souvenirs… « C’était toute une époque » dit-on, tiens donc ! C’est la mienne !!!…

Vieillir ce serait donc ça ?… Voir s’effacer tous ces pans de nos vies, et se retrouver de plus en plus seul face au Présent ?… Il faut toutes ces années et tous ces chagrins pour en prendre réellement conscience, et regarder l’avenir avec davantage de lucidité et d’indulgence. A moins que cette terrible lucidité ne soit l’explication (s’il en existe une ?) à la détresse absolue des dépressifs profonds et suicidaires…)

J’entends encore certaines « absentes » alors encore bien « vivantes » se demander si « le Bon Dieu les avait oubliées » ?… Non, jamais Dieu ou « qui sait » n’oublie qui que ce soit… Mais à chacun(e) son Heure… Et en attendant, dans un EHPAD (triste abréviation pudique ou hypocrite de l’agonie ») ou ailleurs, même chez soi, cette expectative devient à elle seule l’unique possible projet d’une journée, puis d’une autre…

Je sais chaque jour plus précisément que tout a une fin. Demain, ou après-demain, Viktor s’endormira sous la seringue d’un vétérinaire bienveillant qui lui épargnera souffrances et tristesses prévisibles à très court terme, je rentrerai seule à la maison, et comme à chaque deuil, je devrai apprendre à supporter l’Absence. Quoique ayant une certaine expérience de la « chose », chaque nouvelle absence est un apprentissage, long, douloureux, qu’aucun examen ne valide… Curieusement, plus on vieillit, plus on entre en apprentissage du renoncement, et cela n’a rien à voir avec de la faiblesse ou cette sacro-sainte énergie qu’on s’oblige à porter en étendard après chaque défaite… C’est une autre vision qui s’impose doucement, celle de l’inéluctabilité… Rien ne peut être « empêché », parfois retardé éventuellement, mais tout arrive, même ce que l’on croyait encore bien lointain…

« Le secret d’une bonne vieillesse n’est rien d’autre que la conclusion d’un pacte honorable avec la solitude ».
Gabriel Garcia Marquez


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