Blanc

Publié le 22 juillet 2008 par Mirabelle
Mon cher Victor,
 

Dimanche, j'ai passé tout mon après-midi à mettre des babioles en carton, à décrocher des photos, retrouvant les murs de mon futur ex-futur appartement immaculés de blanc. Je pensais que ce serait difficile. Or, "difficile" n'est vraiment pas le mot. Ce fut dur dur, donc ? Ah non... Beaucoup plus aisé que je ne l'aurais cru !
J'aime profondément cet appartement. C'était mon premier, et tout le monde le sait, les premiers, on ne les oublie jamais tout à fait. Pourtant, je n'y suis pas restée longtemps. Mais c'est là que j'ai découvert l'indépendance, la liberté, et comme on me l'avait annoncé plusieurs fois, je ne peux maintenant plus m'en passer. Vivre seule m'a fait grandir. Relativiser certaines choses. Voler de mes propres ailes. Je vais poursuivre ma route à L., me construire de nouveaux repères, continuer ma route. Sereinement.
Ce qui est bien, dans les déménagements, c'est qu'on fait le tri. J'ai enlevé des photos de personnes que je croyais être mes amis et qui ne le sont plus, je me suis séparée de vêtements qui dataient de Matusalem, j'ai jeté des peluches qui me gênaient... Du vide, du vide, du vide ! Et... De l'air, de l'air, de l'air ! J'ai donc pu admirer mes murs blancs comme neige, tels que je les avais trouvé en arrivant ici. Cela m'a fait un drôle d'effet, parce que c'était hier, et qu'il s'est passé tout un tas de choses depuis, plus ou moins positives. J'ai eu mon permis de conduire (youpiii), me suis fait remplacée en une semaine par la personne que j'aimais le plus au monde (j'ai bien dit "aimais", hein, et rien que d'employer l'imparfait, j'en ai le sourire aux lèvres !), j'ai découvert que des amis pouvaient m'envisager comme bien plus que des amis, j'ai rencontré des collègues formidables, des gamins géniaux... Au fond, l'année n'aura pas été si terrible, et cet appartement reflète un mélange de tout ça... C'est là que je me suis écroulée le jour où j'ai appris qu'il avait quelqu'un d'autre, là où j'ai su, au petit matin, que quelqu'un d'autre m'aimait passionnément... C'est dingue comme on associe des lieux à certaines émotions... C'est dans cet appartement que je me suis vue autrement dans le miroir, et ça, ça n'a pas de prix...
Oui, vraiment, je l'adorais, cet appartement. Et j'avoue que cela m'a fait tout drôle d'accueillir des inconnus chez moi, de leur présenter ma chambre, le balcon, la cuisine, la salle de bain, le salon... De leur dire combien j'étais bien ici. Comme si, tout en étant chez moi, je n'étais plus chez moi. Voir leurs mines émerveillées ("Ooooh !!!! Il est bien !!!"), me revoir moi quand je l'ai visité pour la première fois... Pleine d'espoir, toute excitée à l'idée d'acheter des meubles... J'en souris aujourd'hui... Dans dix jours, j'aurais déménagé. J'ai hâte.
Tout à l'heure, en transportant des cartons, j'ai regardé les murs, tout blancs. Bon, d'accord, il y a quelques trous, à cause des cadres et c'est autant de souvenirs. Mais je me dis que c'est ce qui m'attend. Un appartement vierge. Où je ferai ma vie. Une vie à moi seule. En plus, il est trop beau... Je vais être bien, dans mon nouveau chez moi... Du blanc, du blanc, du blanc, du blanc...