Le port du masque s’est avéré depuis belle lurette une habitude pour moi. Parlons plutôt d’une « politesse ».
A quoi bon essayer d’entrainer avec soi dans quelconque chagrin ou contrariété ses proches ou ses « lointains » qui, même des plus attentionnés ou empathiques, s’useront très vite à côtoyer vos accablements. Les amitiés sans faille se comptent sur les doigts d’une main, il faut parfois se « voiler la face » pour ne pas avoir à croiser le regard fuyant de celles qu’on avait cru solides…
Ce « camouflage » est, il faut le reconnaître, une forme de « facilité », qui fait rempart aux confidences, aux questions, aux apitoiements, aux possibles blessures, avancer masquer n’est pas ici se travestir ou mentir, mais au contraire afficher sa courtoisie et son élégance… En revanche, partant d’une intention louable, ce masque devient impossible à baisser sans qu’aussitôt fusent :
« Tu ne nous avais pas habitués à ça » – « Oh mais toi tu es forte, tu rebondiras… » – « Oh ben non, pas toi » !!!… Le bonheur est contagieux dit-on, craindrait-on à ce point que le malheur soit aussi facilement transmissible ?…
Être « fort » demande de la constance, et pas mal de poches où fourrer ses poings quand vient l’Hiver de ces si rares partages… Nos fragilités sont des portes dérobées que les fouineurs aiment emprunter à notre insu, rien qu’un petit bout d’étoffe posé au bord des yeux saura les en détourner.
La bienséance n’est plus de ce monde ou si peu, pour qui aurait le besoin de partager ses tristesses histoire de s’en alléger très provisoirement. Le sourire est une arme redoutable qui réduit à néant toute justification de nos coupables lassitudes. C’est la certitude de n’être ni importuné ni considéré comme un fâcheux…
Un sourire en entrainant un autre, il est souvent le plus sûr moyen de se persuader qu’au fond tout va bien. « Quand on veut, on peut » dit l’adage, j’ajouterai que la méthode Coué m’a prouvé maintes fois son efficacité. « Il suffit d’y croire » et presque tout devient réalité, sauf bien évidemment la résurrection de ce qui nous est ôté… Mais la renaissance du désir, le regain de l’espérance, ça oui, moi j’y crois !
On parle de toutes sortes de deuils, celui d’un être aimé n’est pas autrement fait que celui d’une époque ou d’une situation. Il faut y puiser d’autres raisons de vivre avec ce qui nous est nouvellement imposé. Point de courage ici, juste de la ténacité et peut-être aussi un peu d’orgueil ! N’est pas né celui là qui effrontément m’arrachera mon masque, et d’ailleurs si besoin, j’en ai bien d’autres de côté, avancer masqué, hier comme aujourd’hui, c’est se protéger, et protéger les autres… Le reste n’est que billevesées.