Quand j’étais mouflette, j’adorais les playmobil. Je leur faisais vivre des aventures incroyables dans des constructions en légo, c’est dire comme c’était moderne le vingtième siècle. Et puis, quand j’en avais marre, je détruisais la construction en légo et je rangeais les playmobil dans leur boite. Ou plutôt je les laissais en vrac, parce-que s’ils étaient trop bien rangés, je risquais de les oublier. Et pour jouer, c’est gênant.
En tant que citoyenne d’une brave démocratie, et surtout en tant que fonctionnaire de l’État qui porte cette démocratie, je me sens actuellement mi-playmobil mi-légo, jouet aux mains d’incompétents incapables d’assumer leurs errements et leurs erreurs, sinon en remettant tous les joujoux dans la boîte parce-qu’ils ont perdu la partie. La remise des joujoux dans la boite, en langage adulte, ça s’appelle le confinement. Néanmoins, certains playmobil continueront de jouer car il faut que la garderie nationale soit ouverte pour que les parents puissent travailler. Ce sont des playmobil qui ont de la chance : ils jouent avec des enfants. Petits veinards !
Hier soir, lors de la conférence de presse du gouvernement, monsieur Blanquer a ainsi clairement dit aux proviseurs des lycées qu’ils étaient libres d’organiser la rentrée du 2 novembre comme bon leur semblait pour que leurs playmobil puissent bien travailler, sachant qu’il faut à la fois respecter le protocole sanitaire et rendre hommage à Samuel Paty.
Monsieur le Ministre laisse donc à ses sous-fifres le plaisir de gérer la merde semée par sa réforme du lycée. Car, si, lorsqu’il l’a pondue, le risque covid n’existait pas, celui, plus pédagogique, du brassage infini d’élèves de toutes les classes d’un même niveau était bien pointé. Il en a fait fi mais ne semble point fort marri, puisque c’est sur le terrain qu’il faut gérer l’embrouille du brassage et des contaminations potentielles, tout cela avec des masques dont la toxicité supposée donne plus envie de les jeter que de les porter.
Nous voilà donc dans un certain embarras, sans aucune info officielle du ministère, ni du rectorat, ni du lycée. Mais quand même, mes collègues et moi-même apprenons par des élèves que les emplois du temps ont été modifiés. Nous sommes vendredi en fin d’après-midi, le week-end commence, et, confinés ou pas, nous sommes en droit de finir de profiter de la fin de nos vacances (pour corriger les copies en souffrance ou finir de préparer des cours, mais faut pas le dire trop fort), et nous n’avons aucune info officielle. Ni non plus les attestations qui nous permettront de venir légalement au boulot lundi, confinement oblige. Je vous promets que si je prends une prune en allant au taf, je démissionne. Ou je prends ma retraite, même si je n’en ai pas l’âge.