C’est un arbre qui porte bien son nom, au printemps, ses fleurs ressemblent à de petits mouchoirs blancs posés ça et là sur ses longues branches brunes.
Mon amoureux me l’avait offert, nous lui avions trouvé sa place juste en contrebas de la terrasse où nous l’espérions voir un jour telle une ombrelle sur nos déjeuners dès les premiers soleils. Je serai hélas seule à le voir grandir et à chercher un peu de fraîcheur sous son houppier lacté…
Faut-il y voir quelque coïncidence ?… Voici plusieurs années qu’il m’offre à foison ses pétales d’opaline… Je n’en demandais pas tant, mais les arbres et moi nous partageons de longues conversations murmurées en connivence. La Nature apprécie qu’on lui parle, je ne la prive jamais d’un compliment ou d’une déclaration d’amour, croyez le ou pas, un pissenlit est aussi sensible qu’une rose aux louanges qu’on lui fait, souvent il suffit d’un mot gentil pour qu’ils reprennent goût à la vie après une « assoiffée » d’été…
Je suis ainsi faite, de ces amitiés déconcertantes, de ces affinités précieuses et enchantées picorées au coeur de ce que ce monde me propose.
L’été dernier encore mon arbre en prenant de la hauteur, m’offrait une cascade cotonneuse. Je connaissais le chagrin qui m’attendait derrière ses mouchoirs blancs, je me préparais à l’affronter comme les précédents… Cette certitude qu’il n’était pas loin, qu’il approchait sans même prendre la peine d’être discret, pesait et étouffait mon cœur déjà bien éprouvé…
Mon arbre n’y est pour rien, je le sais bien, il fait ce qu’il peut pour m’apaiser, avec ce que son essence lui permet, de jolis mouchoirs où les abeilles viennent pique-niquer, et qu’il me tend, désolé de n’avoir pour mission que de tenter de me consoler… Après plus de quinze années d’amour partagé, de complicité et de confiance, la vieillesse s’était emparée de mon adorable Viktor, mon précieux petit chien, ma « grenouille », mon bébé… Il était encore là, pour peu de temps vraisemblablement, chaque jour en était un de plus gagné sur l’Absence, mais aussi un cruel compte à rebours du moment où il faudrait décider qu’il serait l’heure de perdre ce merveilleux bonheur d’être deux…
A Viktor, mon petit shi-tsu d’amour, nous avons tous deux eu la chance de nous connaitre et de partager le meilleur de ce que nous avons voulu être l’un pour l’autre, la quintessence de la confiance réciproque.