Disons-le tout net, la journée avait moyennement bien commencé. Déjà il pleuvait, format grosse averse, et même avec le ciré (le jaune, oui, le vrai, faut pas tricher avec la pluie), j’avais la guibole humide et le pas accéléré pour aller taffer. Sur le trajet se trouve un collège, un brave collège avec des collégiens, bien tassés sur les trottoirs dans l’attente de l’ouverture du lieu scolaire. Des mouflets et des minots qui courent, qui braillent, qui font des moulinets avec leurs trottinettes, même que, ce matin, j’ai bien failli en recevoir une sur le museau. Et puis il y a celles et ceux qui viennent en vélo. Au moins, il faut les créditer de cela, ces marmots ne sont pas tous amenés en SUV à la porte de leur collège, ils fournissent quelques efforts physiques et ne chouinent pas sous la pluie. Ça flotte pourtant dru, et la visibilité s’en ressent, mais à pied ce n’est pas bien gênant. Sauf lorsque une gamine fonce littéralement sur moi avec son vélo, hurlant de rire en apercevant ses copines. Je l’esquive, certes, mais râle un « faites un peu attention » qui plonge la marmaille dans un grand rire, une marmaillotte gloussant, avec un aplomb dont les élèves de 5e et 4e ont le secret (je le sais, j’ai testé en début de carrière) : « Si vous n’aimez pas les enfants, faut pas venir ici ».
Alors je le dis tout net, avoir du expliquer ensuite, à des lycéens encore un peu ensommeillés, les subtilités des traités de Westphalie (1648), m’a procuré un immense sentiment de bien être. Enfin je retrouvais ma zone de confort, face à mes choupinets à moi, qui prenaient des notes et trouvaient la guerre de Trente Ans tour à fait digne d’intérêt. Et pourtant, au premier abord, les bastons du XVIIe siècle ne semblaient pas faciles à vendre.