Isabelle Junca | L’île-mer

Publié le 01 janvier 2021 par Angèle Paoli

L'ÎLE-MER
(extrait)

M on père l'affirmait : il y a des îles-mer et des îles-terre.

La Corse et la Sardaigne seraient des îles-terre et Chypre, une île-mer.

Un carrefour, aussi. Je ne sais pas pourquoi, mais c'est là que je vais.

Peut-être pour la Vénus de Botticelli ; ou peut-être simplement, pour aborder aux rivages de l'île d'une Aphrodite écumant de désir. Engendrée par Aphos, née de l'écume marine, portée par Zéphyr jusqu'à son rivage,

la belle posa les pieds sur un rocher.

Au commencement étaient le Ciel et la Terre,

était l'infini du désir.

Crépuscule rougissant d'un monde embrasé, comme ceux dont les soirs du sud tapissent nos ciels de lits.

Puis vint le temps et son recommencement.
Et le ciel et la mer eurent le bleu en partage, et

l'horizon comme fusion.

Tout homme qui regarde la mer regarde peut-être vers Chypre et l'immortalité.

Chypre, aérée et bienheureuse.
Chypre, entre Orient et Occident, saluée par Homère comme " l'île au large ".

Chypre, cette île où le soleil donne, brillant d'un éclat cuivré ondulant surs ses mèches échappées.

Mon échappée.

La tienne : le ciel.

Isabelle Junca, " III. L'île-mer ", La Pier de C. ou La mer regarde, éditions Al Manar, Collection Poésie, 2020, pp. 20-21. Peintures d'Abdallah Sadouk.