Parloir improvisé

Publié le 24 juillet 2008 par Deathpoe
C'était comme si j'avais soudainement trouvé un écho à ma souffrance. Ce n'était ni un remède ni un explosif, mais il y avait une réponse. Il faut bien le dire, ça me remuait encore un peu la nuit dernière. Je n'étais cependant même pas satisfait de ce qui s'était produit, bien malgré moi. Et je la revois encore, il y a deux jours, assise dans le canapé et engageant une conversation que je jugeais sur le moment inutile.
«Tu sais, quand ton frère est mort, l'autre pleurait comme une madeleine. Quant à moi, j'allais te voir à l'hôpital. Et tu pleurais, et tu pleurais. Alors je t'ai dit, "tiens bon mon bonhomme, j'ai encore besoin de toi."»
Je ne voyais toujours pas où elle voulait en venir. Peut-être que ça n'avait pas vraiment d'importance, et ça ne m'empêchait pas de boire une gorgée de café.
«Tu sais, y'a pas que les femmes et l'argent dans la vie. Et l'alcool, ce n'est pas une solution. J'ai lu un peu ce que tu écris cet après-midi, et je me suis rendue compte que tu n'étais pas heureux. Et je ne sais pas pourquoi. Tu vas avoir vingt ans mais je te le redis: "tiens bon mon bonhomme, j'ai encore besoin de toi."»
J'avais pourtant oublié à quel point je détestais la voir fondre en larmes, d'autant plus que j'en étais la plupart du temps la cause. Je ne trouvais rien à dire, rien à faire. Comme cela arrive toujours, j'aurai pu la prendre dans mes bras, la consoler et lui dire que tout irait bien. Mais ce jour-là, je n'en étais pas convaincu moi-même.
«Tu sais, l'argent, les études et tout ça, je m'en fous finalement. Tout ce qui compte, c'est que tu sois heureux.»
Alors je n'ai trouvé qu'à m'indigner du fait qu'elle n'avait pas à lire ce qui traînait, tout en pensant pour moi-même qu'il serait temps de regrouper carnets et papiers divers pour les mettre en lieu sûr. Du reste, je tentais de ne rien laisser apparaître, et y parvenais. J'allumai une cigarette. Il n'y avait rien à ajouter.
Noir Désir "L'appartement"
"Avec ou sans toi, j'ai quelques problèmes
Tu t'en fous, Laura, j'suis désolé quand même
Si tu vas par-là, ça me convient aussi dépose-moi
Encore une fois, c'est d'en bas que j'appelle
Elle se penche parfois de son nid d'hirondelle
Daigne me recevoir, ne me laisse pas de place pour m'asseoir
Elle a su, simplement
Changer les clefs de son coeur
Et de l'appartement
Attends-toi à c'que je me traîne
A tes pieds, Laura, en attendant je sais
Que le jour viendra, où je pourrai en mourir de rire"