J’ai consacré une série de 21 billets aux nouvelles formes de l’Art qui ont émergé autour des années 1960. Certaines de ces formes artistiques sont éphémères Par exemple les performances = l’art corporel = le land art ou encore les inscriptions sur les murs (statements) de Lawrence Weiner. Elles ne sont plus, dans certains cas, d’être conservée en l’état, de la conserver au sens de la pratique muséale. En un mot elles se dématérialisent cf. émission de France Culture » la disparition de l’œuvre.«
L’écrivaine Lucy Lippard publie en 1966, en collaboration avec John Chandler, un essai intitulé » The dematerialization of the art » (+) Ils ont décrit un monde de l’art « ultra-conceptuel » sans objets et où l’atelier de production matérielle des œuvres disparait. En effet, l’art conceptuel s’oppose radicalement à la vision antérieure de l’art puisqu’il ne s’attache plus aux formes et aux matériaux, même s’ils peuvent subsister mais aux idées et aux sens.
Il remet essentiellement en question le statut traditionnel de l’objet d’art en tant qu’objet unique, de collection ou de marchandise. Ce phénomène de dématérialisation est depuis admis par le plus grand nombre. A lire l’article provocateur de Fred Guzda « L’Art conceptuel n’existe pas »
Mais y a-t-il un marché de l’art immatériel ? Oui les traces des œuvres immatérielles se vendent.Les clichés des performances de Liu Bolin se vendre bien. La photographie « Red in the East » de 2006 a ainsi été adjugée en salle des ventes à Drouot en septembre 2018 pour 7 000 € . Les empaquetages de Christo disparaissent mais ses dessins préparatoires (+) se vendaient pour financer leurs installations.négocient. Il en est de m^me avec les des reliques de Daniel Burden, des photos des actions d’Alain Declercq. Et en précurseur l’artiste Yves Klein. Enfin ce peut être une instruction , le protocole, qui soit vendue, c’est-à-dire un document qui stipule les conditions d’activation de l’œuvre, ses modes d’exécution.
Cette absence de support tangible pose cependant des problèmes juridiques c.f. la thèse de Claire Le Henaff » Les critères juridiques de l’œuvre à l’épreuve de l’art Conceptuel » . L’art conceptuel ne répond pas aux critères de qualification de l’œuvre d’art définis par l’article L. 111-1 du Code de la propriété intellectuelle au regard des droits d’auteur. Car celui-ci ne protège pas les idées et les concepts.
Il importe pour l’artiste et les musées de conserver une trace des œuvres immatérielles telles que les performances , les installations ou les arts de la scène. On utilisera la photographie, la vidéo, les enregistrements audio ou encore les capsules de MemoRekall. Se pose aussi le problème de la conservation des œuvres numériques. La Tate Modern s’en préoccupe depuis 2004 au travers du programme time-based media art. Le Moma quant à lui, il a créé The Museum of Non Visible Art, pour les œuvres qui n’existent pas matériellement.