29.PortoCela fait un vieux bien que de découvrir une belle grande ville, où l'on se dit tout de suite qu'on pourrait habiter. Je me le suis dit cent fois à Paris où je n'ai habité que de temps en temps, et à Berlin aussi, à Rome, à New York ou à Berlin, à Lisbonne mais pas du tout à Vienne dont les gens et Thomas Bernhard m'ont dégoûté, non plus qu'à Stockholm mais ce serait à réévaluer quarante ans plus tard, alors qu'à Porto je reviendrai comme nous reviendrons à Lisbonne ou à Madrid rien que pour le Prado ou le Rastro...Ce qu'il y d'immédiatement splendide à Porto c'est que la ville, contrairement à Tokyo où l'on est toujours dedans et jamais avec assez de recul même au 60e étage d'une tour de Ginza, apparaît aussitôt et sous de multiples points de vue. Le fait qu'elle soit montueuse facilite évidemment les choses, comme à Lausanne ou Rome et à San Francisco, et les hautes rives du Douro, d'où l'on découvre l'ensemble de la ville ancienne, nous réservent des vues d'ensemble incomparables...Je ne sais plus qui disait: « Dis-moi ce que tu relis et je te dirai qui tu es » ? Ce qui est sûr est qu'on pourrait dire la même choses des villes grandes ou moins grandes (je pense à Sienne et à Séville) dans lesquelles on revient pour les relire, et déjà je sais, même en ne faisant que passer à Porto, que nous y reviendrons comme nous reviendrons à Lisbonne.Nous n'avons passé que quelques heures à Porto mais son ton, la tranquille amabilité de ses gens, le sourire immédiat de ses gens - dont les Espagnols sont plus avares-, la beauté des jeunes gens dans tel bar ou tel café agréablement enfumé, le mélange de baroque un peu sud-américain de ses églises et le côté napolitain parfois de ses façades où sèche le linge, la bigarrure populeuse de ses rues passantes et l'aspect bordéliquement organisé de sa circulation, les ponts immenses et l'empilement enchevêtré des façades au graphisme évoquant un peu Vieira de Silva, en un mot l'habitus de Porto - tout cela nous a donné l'envie de revenir bientôt et de relire Porto…