Je t'avais pas encore raconté, parce qu'il me fallait le temps de digérer un peu avant de tout te régurgiter avec l'enthousiasme, le raffinement et la classe qui me caractérisent.
Du coup, j'ai mis une semaine, exactement, à pondre ce petit billet.
(et je ne compte pas les 24 heures pendant lesquelles Over-Blog s'est barré en sucette)
Sept jours.
Le même nombre de cycles jour-nuit que Dieu lui-même a consacré à la Création.
Oui, parce que Dieu n'a accepté de souffler un peu que le septième jour, et ça tombait plutôt bien, vu que c'était un dimanche.
Il ne s'est pas pris de RTT, Dieu, il ne s'est pas branlé en sifflant un Ricard pendant que le barbecue lui cramait ses merguez et que sa bourgeoise se fadait un épisode des Feux de l'amour.
De deux choses l'une.
Soit Dieu n'était pas un beauf de banlieue (ce qui expliquerait qu'il n'avait pas de temps à consacrer aux barbecues entre voisins, au lavage de la bagnole et aux matches du PSG).
Soit il était sarkozyste avant l'heure (et dans ce cas il était beauf jusqu'aux doigts de pieds, et si ça se trouve, il avait même une chaîne en or de la taille d'un antivol avec une croix plus grosse que l'ancre du Titanic).
Pourquoi je te parle de Dieu, moi?
.......
Ah oui!
A cause de tante Adeline.
Tante Adeline, c'est pas ma tante à moi, hein.
Nan, ma tatie à moi, elle sort tout droit d'un film de Woody Allen, c'est la sexagénaire juive névrosée jusqu'au trognon et plus hystérique que Blanche Wittman face au docteur Charcot. Ma tatie à moi, c'est Anne Bancroft dans Torch Song Trilogy.
Tante Adeline, c'est du côté de ma femme.
Et justement, à propos de Dieu, tante Adeline est très copine avec Lui.
Tante Adeline, c'est le croisement improbable de Bernadette Le Quesnoy avec Nicolas Sarkozy.
Je te jure.
De madame Le Quesnoy (cours vite louer La vie est un long fleuve tranquille, inculte lecteur qui ne voit pas de qui je parle), tante Adeline a pris ce côté terriblement cul-béni, cet aspect rebutant de grande bourgeoise mal baisée qui passe l'essentiel de son temps libre aux kermesses paroissiales (le reste de ce fameux temps libre, elle le passe enfermée dans sa chambre avec sa collection de sex-toys, je suppose).
Le côté Sarkozy de tante Adeline, et c'est là que tu vois qu'elle appartient à cette pathétique engeance des "nouveaux riches", c'est son goût de chiotte immodéré pour le bling-bling.
Elle suinte tellement le bling-bling par tous les pores de sa peau qu'elle en ferait presque passer le Président de la République pour un bobo un peu fauché collectionneur de boîtes de camembert.
- Vous savez qu'on a construit une nouvelle piscine? Oui, dans notre villa du Crouesty. Ah, je voulais quelque chose de parfait, alors je n'ai pas regardé à la dépense, vous pensez bien! J'ai même fait installer des douches à côté du bassin. Mais pas en contre-plaqué, mon Dieu, quelle horreur! Non, j'ai choisi du teck pour les parois. Je vous ai dit que j'avais fait refaire notre cuisine? Pas celle de la villa, non, celle de l'appartement de Versailles. Évidemment, j'ai pris du sur mesure. Je ne vous donne pas le prix, c'est indécent...
Et ainsi de suite.
Tante Adeline, tu ne l'entendras jamais s'écrier, comme madame Groseille:
- Oh ! Putain, les enculés ! Ils nous ont refilé l'fils du directeur de l'EDF !
D'ailleurs, son mari, qui est Directeur Général de je ne sais combien de grosses boites et qui est une petite star au MEDEF, il ressemble un peu au père Le Quesnoy: Pas méchant, propre sur lui et autant porté sur la déconne qu' un entrepreneur de pompes funèbres au moment d'une crémation.
C'est à se demander comment ils ont pu avoir des mômes, vu que quand tu les regardes, tu as autant de mal à les imaginer en train de pratiquer la bagatelle qu'à te représenter Christine Boutin en pleine partouze multi-ethnique.
Moi, j'avais promis de bien me tenir, même si on m'avait parlé de tante Adeline depuis longtemps et que j'avais très envie de trouver un petit truc pour l'embêter gentiment, une sorte de poil à gratter verbal, comme de chanter l'Internationale à table ou de proclamer innocemment que "Dieu est une lesbienne noire".
Elle m'a serré la main, et j'ai bien senti quelle serrait aussi les fesses, parce que ça devait quand même lui faire un peu mal au cul de saluer une fille qui était non seulement une invertie, mais en plus métisse et de la même origine que les assassins du Christ.
Mais elle est bien élevée, tante Adeline, et elle a rien dit.
Et comme moi aussi, j'ai été bien élevée par mes parents, qui ont mis beaucoup de confiance dans le dedans de moi, j'ai fermé ma gueule pendant toute la soirée, même quand ses petits-enfants (aussi blonds que Les Triplés et aussi puants qu'Agnan dans Le petit Nicolas) se sont mis à snober ma gosse de quatre ans, qui essayait désespérément de leur demander leurs prénoms et de savoir s'ils voulaient jouer avec elle.
Tu sais quoi?
Moi, j'ai toujours préféré ces gros cons de Groseille.
Ils étaient moches, ils étaient fachos, vulgaires et aussi éveillés qu'une bande de moules sur un rocher.
Mais au moins, ils étaient pas confits dans le formol, et surtout, ils étaient marrants.