Magazine Journal intime

Rrrratmoureux - le dénouement

Publié le 29 juillet 2008 par Anaïs Valente

Psssssst, vous là.  Oui, vous.  Approchez.  C’est moi, le rrrrrat, le mulot, la grosse souris grise, le campagnol domestique, le rongeur bavard.  

Voilà. 

Maggie, c’est fini (et dire que c’était mon premier amour - à chanter sur l’air de Capri, vous l’aurez compris).

Elle est partie.  Pour toujours.  Oui, pour toujours.

Jamais je ne la reverrrrai.  Mais jamais je ne l’oublierrrrai.

C’est indéniable, je suis rrrratmoureux.

Passque l’Anaïs, ben, elle a fait du cobaye-sitting durant dix-huit jours.  Dix-huit journées de bonheur intense, durant lesquelles j’ai oublié toute sensation de solitude.  Cette solitude propre à ma condition de rrrrat des villes solitaire et abandonné (c’est là que vous pleurez ou que vous créez une pétition pour me libérer de mes chaînes).  Dix-huit journées de pur plaisir.  Platonique hé, n’allez rien vous imaginer de salace, séparés que nous étions par les barreaux de nos cages respectives (j’ai eu beau tenter de les ronger, mes dents n’étaient pas assez puissantes, foi de rrrrat).

Maguy est donc arrivée un jeudi soir.  Enfin Maggie.  Maggie est son véritable prénom, à ma petite cochonne d’amour (et d’Inde).  Anaïs, avec son grand âge, elle a plutôt pensé à la Maguy de la série TV. Keskelle est biesse, je suis d’accord, vous êtes d’accord, nous sommes d’accord.  D’autant que c’est la Maggie, des Simpson, of course.  Il est temps de songer à vivre avec son temps Anaïs ! 

Donc le bestiau est arrivé un jeudi soir, et immédiatement, ce fut le drrrrame.  Passqu’Anaïs, ben, tenez-vous bien, accrochez-vous à votre dentier ça va rire dans les zygomatiques : elle avait oublié qu’elle était allergique aux cochons d’Inde.  Et au foin.  Oublié.  Rien que ça.  Faut dire qu’elle est allergique un peu à tout, faut dire.  Et elle y pense jamais, faut dire.  Elle est bête, faut dire, mais ça vous le savez.  C’est ainsi qu’on la retrouve souvent rouge, gonflée et suffocant, lorsqu’elle entre en contact avec des substances ou des bestioles peu recommandables pour sa frrragile constitution.  Et là, ben elle a encore oublié.  Carrément.  Elle a accueilli Maggie sans vraiment réfléchir, tout à sa joie d’avoir une petite compagnie bien sympathique pour moi (et pour elle, c’est un fait) à la maison.  Dix minutes après l’arrivée de la cochonnaille miniature, clair qu’elle réfléchissait déjà à comment survivre durant dix-huit jours en toussant, crrrrachotant, reniflant et étouffant à qui mieux mieux.  Kho Lanta version urbaine. 

Aaaaaah ça valait le détour, ma bonne Dame, pour reprendre son expression favorite, de la voir dans un tel état, sachant qu’il restait encore près de 450 heures à tirer.  Comment ça, je suis un rrrrat sans cœur ?  M’enfin.  Si on peut plus rire.

Nous avons donc vécu, elle et moi, au rythme de ses crises d’allergie, lesquelles se manifestaient surtout lorsqu’elle passait à proximité de nos cages, installées côte à côte, donc à tout moment du jour, mais, fort heureusement, point de la nuit.  Vous auriez dû la voir, nettoyant la cage de Maggie, avec un masque de protection sur le nez, par 30 degrés à l’ombre, suant comme un cochon pas d’Inde, pestelant à chaque seconde, reniflant comme un goret (décidément, nous restons dans le milieu porcin).  Et les gouttes qui tombaient systématiquement de son nez sur le sol, sans passer par la case mouchoir.  Et pas que des gouttes, beurk beurk et re-beurk, aussi du presque solide, mais suffisamment liquide pour que ça coule.  Vous voyez le topo.  Pas rrrragoûtant.  Ça doit être ça, le dévouement pour la cause animale.  Elle va être canonisée, l’Anaïs.

Ensuite, elle se réfugiait dans sa chambre, interdite à tout rongeur, sifflait des poumons comme un train vapeur, crrrrachottait encore et encore, émettait des rrrrâles comme si elle allait passer l’arme à gauche à tout moment, envisageait d’appeler les urgences, reprenait une petite dose de potion magique, tentait de respirer calmement, recrrrrachottait, re-rrrrâlais, repensais à l’hôpital et je vous en passe et des meilleures.  Une véritable série télé.

Pendant, ce temps, moi, j’étais aux anges.  Au parrrradis des rongeurs.  Nirvanesque.  Dix-huit jours à croiser son regard de braise.  Dix-huit jours à entendre ses petits couinements amoureux.  Si, si : amoureux.  Je crois au coup de foudre, moi.  Pas vous ?  Dix-huit jours à voir son corps de déesse se déhancher pour attrrrraper une carotte ou un brin de paille.  Dix-huit jours à roucouler ensemble.  Dix-huit jours à admirer sa jolie petite truffe.  Dix-huit jours à refaire le monde ensemble.  Dix-huit jours à se susurrer des mots doux, à échafauder des projets d’avenir.  Un avenir improbable.  Un avenir incertain.  Car nous le savions, la séparrrration était inéluctable.  Roméo et Juliette des temps modernes.  West Side Story version rongeurs.  Mais Maggie devait retrouver sa famille.  Et moi rester ici.  L’Anaïs, elle a besoin de moi, c’est clair et net, aussi clair que rrrrat et cobaye n’ont fait qu’un durant dix-huit magnifiques journées.

Inoubliables journées.

Romantiques journées.

Puis elle est partie.  Là.  Elle vient de partir.  Ce lundi soir.  La séparrrration fut douloureuse.  Pas besoin de mots, j’ai tout lu dans son regard.  Maggie, je ne t’oublierai jamais.  Et t’as pas intérêt à m’oublier pour un bellâtre à rosettes, est-ce bien clair ?

Bilan de ces dix-huit jours made by l’Anaïs : deux sprays de Ventolin, deux boîtes de Zyrtec, trente-huits paquets de mouchoirs, un masque de protection, trois crises d’angoisse, dix litres de reflux nasal, trois pustules sur les brrrras, 1232 éternuements, dont 765 avec glaires propulsées dans tout l’appart, un mal de gorge et des yeux de lapin atteint de choriza chronique.  Rien que ça.

Bilan de ces 18 jours made by the rrrrat : à part le fait que l’Anaïs a chanté, durant 18 interminables journées « elle voit souvent rouge, avec elle ça bouge, Maguy soleil ou bien Maguy larmes, on est sous le charme », expérience formidable, et c’est maintenant indéniable : je veux la revoir.  Et nous nous marierons et nous ferons plein de petit rrrratchons.  Yesssss.  Qu’on se le dise.

Illu de Mako, super fan de chons.  Je vous conseille d’aller de suite visiter son blog… elle vient d’y poster des photos de chons à lunettes à se tordre de rire par terre.

chon2



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