Comme j’ai déjà, sur ce blog, lancé des cris concernant l’apparente impossibilité d’arriver, dans ce pays, à des consensus sur un certain nombre de questions économiques et politiques, y compris à des consensus à travers le prisme de l’évaluation, je dois dire que cette lecture m’a fait du bien.
En effet, elle m’a confirmé dans l’idée que je ne me monte pas la tête. Qu’il est effectivement très compliqué d’arriver à des constats partagés, essentiellement pour des raisons idéologiques. Un morceau choisi :
" … un processus d’évaluation comporte deux phases : l’étude elle même et l’obtention d’un consensus sur ses résultats. Ce second point est souvent absent de la réflexion. Que nous apprennent les 35 heures sur ce second point ?
On dispose aujourd’hui d’un recul suffisant et de données suffisamment riches pour évaluer précisément l’impact des lois Aubry sur l’emploi. Sur l’emploi, les études officielles (Dares et Insee) convergent pour dire que les 35 heures ont eu un effet net sur l’emploi de l’ordre de 350 000 environ. Et pourtant, ce qui frappe surtout, c’est l’absence de consensus sur l’effet de cette mesure. Certains avancent le chiffre de 500 000 emplois créés, tandis que d’autres estiment que les 35 heures ont globalement détruit plutôt que créer des emplois. D’où cette incertitude et le doute qui plane sur des travaux réalisés par des institutions prestigieuses (Dares, Crest, Insee, centres de recherche universitaires…). Il est normal que dans un travail d’évaluation, les résultats ne soient pas exactement les mêmes d’une étude à l’autre puisque les chercheurs ne mobilisent ni les mêmes données ni les mêmes techniques. Mais l’écart entre les études scientifiques et les commentaires avancés est surprenant."
Se peut-il que sur les 35 heures, comme sur d’autres sujets tout aussi cruciaux, les discours en restent éternellement à des positions de principe, sans aucune possibilité de poser un regard dépassionné sur les choses, malgré les outils récemment mis en œuvre (LOLF notamment) ? Se peut-il qu’il soit impossible d’ajuster une politique ou une réforme, tout simplement parce que pour un camp tout est "génial" et que pour l’autre tout est "à jeter" ? Se peut-il que nous soyons condamnés à aller un coup dans un sens, un coup dans l’autre, au gré des retournements de tendance, sans jamais se conformer à une sorte de cap sur lequel chacun pourrait s’entendre ?
Sur ces interrogations, la lecture de l’article ne m’a pas vraiment incité à l’optimisme, d’autant que la conclusion a quelque chose qui, parfois, a l’air de tenir du vœu pieu : "Si l’on veut ‘réformer en profondeur’ la société française, comme le souhaite le gouvernement actuel, il est important de repenser et de réformer nos modes de gouvernance. Ces changements ne pourront s’effectuer, ni par la loi, ni par le marché mais par l’émergence d’une démocratie sociale reposant davantage sur le dialogue entre partenaires sociaux responsables s’appuyant sur une démarche pragmatique de compromis."