Le 6 février 1934

Publié le 28 août 2021 par Perceval

L’insurrection fera quinze morts dont quatorze parmi les manifestants et près de mille cinq cents blessés...

Lancelot, le 6 février 1934, était avec son ministre de tutelle, Joseph Paul-Boncour, un proche de Painlevé, à l'Assemblée Nationale. Celui-ci venait d'être nommé ministre de la Défense nationale et de la Guerre, deux jours plus tôt, après la démission de Fabry lors du déplacement forcé du préfet de Police Jean Chiappe, proche des ligues...

Précédemment aux affaires étrangères, Paul-Boncour, est sensibilisé au danger qu'exerce le NSDAP sur la France ; il défend l'idée d'une alliance avec l'Union Soviétique...

Jean Chiappe, au poste de Préfet de police de Paris depuis sept ans, est une personnalité très influente. Il ne cache pas son soutien aux ligues d'extrême-droite...

Les 9 janvier, 11 janvier, 22 janvier 1934, les ligues (camelots du Roy, croix de feu du colonel La Rocque, Ligue des Patriotes, etc...) ont appelé '' le peuple '' à des manifestations, avérées violentes.

En cause, trop de scandales, et particulièrement avec l'affaire Stavisky ; sont révélées les escroqueries et le suicide d’Alexandre Stavisky – un juif d'origine étrangère qui corrompt hauts-fonctionnaires, parlementaires et magistrats, peut-être même des ministres.. !

Le 3 février 1934, le nouveau président (radical) du Conseil, Edouard Daladier, renvoie ( déplace) Jean Chiappe sous le prétexte d'être impliqué, au moins dans sa gestion, dans l'affaire Stavisky.

Chiappe, refusant cette mutation forcée, alimente l'appel à manifester le 6 février, le jour même où Daladier doit être investi par la Chambre : un appel à manifester contre la corruption parlementaire et donc, en soutien au préfet de police.

En cette soirée du 6 février, Drieu la Rochelle comme beaucoup d'autres parisiens, observent les événements. Il s'approche de la place de la Concorde, et rejoint les manifestants ; parmi eux, il ressent la présence de ses camarades de Charleroi et de Verdun, la colère plein leurs yeux. Des pancartes : « Sortez les sortants ! » ou « Mort aux vendus ! ».... Et si quelque chose enfin arrivait ?

Tous unis, pourquoi ne pourrait-on pas se débarrasser de tout ce qui est pourri ?

Des députés favorables aux ligues, font l'aller-retour pour donner de l'information à ceux de l'intérieur du palis Bourbon.

La manifestation se transforme en émeute, et des ligueurs envisagent d'envahir l'Assemblée pour empêcher que les députés votent la confiance au nouveau président du Conseil.

Des camions de police barrent le pont de la Concorde et sur la rive gauche les abords du Palais-Bourbon. Devant les Tuileries Drieu voit les gardes à cheval, prêts à intervenir.

Sur l’esplanade des Invalides, il y aurait également de très nombreux manifestants, les anciens combattants avec leurs drapeaux.. Les troupes de La Rocque arriveraient par la rue de Bourgogne.

Avant vingt heures, place de la Concorde, un coup de feu parti d'on ne sait d'où, fait répliquer le feu de la police ; puis les gardes montés, chargent sabre au clair.

Drieu suit les mouvements de la foule autour de la Concorde. Sur un taxi, un homme allongé et du sang. Ils tirent.. ! Un autobus flambe à l'entrée des Champs-Élysées.

Minuit passé, Drieu erre toujours, la foule se disperse et les blessés sont enlevés.

Drieu dira : «  A partir de 1934, j’ai trouvé la fin de mes doutes et de mes hésitations. En février 1934, j’ai définitivement rompu avec la vieille démocratie et avec le vieux capitalisme »

A la Chambre, la tension en cette soirée est à son comble ; ce serait donc une véritable émeute, aux portes de l'Assemblée. On entend les charges des gardes à cheval ; puis des coups de feu. Les députés sont-ils menacés ? Serait-ce un coup de force fasciste ? On s'interroge sur la loyauté des forces de l'ordre, de plus, insuffisantes ... Au milieu de député découragés, étonnamment, Léon Blum reste calme assis sur son banc. Il prend brièvement la parole « si le gouvernement maîtrise la situation avec énergie, en faisant confiance à la volonté populaire, il peut compter sur nous. S'il faillit à son devoir, c'est nous qui lancerons un appel au pays tout entier... La réaction fasciste ne passera pas.»

Pourtant, parmi les députés présents, favorable aux ligues, certains appellent à quitter la Chambre. La plupart refusent de laisser la place - Daladier a obtenu la confiance – ils craignent qu'un gouvernement provisoire puisse être proclamé en leur absence... Plusieurs députés ont dormi là.

Finalement, le lendemain Daladier démissionne; ce qui pourrait paraître comme comme une défaite de la légalité ; puisque ''la rue'' l'emporte.

Pour Léon Blum, l'urgence est de consolider la République. Il s'agit de montrer que les forces populaire ne sont pas du côté de l'insurrection fasciste.

La grande manifestation du 12 février, semble le premier pas d'une réponse. La CGTU ( communiste) et la CGT (socialiste) ont chacune leur cortège à chaque côté du cours de Vincennes.

Ils se rencontrent, et aux cris de ''Unité !, Unité ! '' s'associent.