20h30 : Concert d’Aline Impieri au PL Pilier Rouge pour présenter son nouvel EP. Le spectacle est bien rodé, rien à dire, je commente « Mention peut pas mieux faire » ! Le concert est suivi d’un pot avec le public : Aline garde les pieds sur terre malgré sa notoriété dans la région ; ça n’a l’air de rien, mais il y a tellement de minables qui se prennent pour le centre du monde dès qu’ils sont passés trois minutes à la télé, alors imaginez pour une vraie bonne chanteuse, championne de « N’oubliez pas les paroles »… Je ne sais plus exactement dans quelles circonstances je l’avais rencontrée pour la première fois, mais je suis ravi de l’accueil chaleureux qu’elle me réserve à chaque fois ! Cela dit, autour du verre de l’amitié, elle a un concurrent : son charmant petit garçon de six mois qui fait craquer tout le monde, moi le premier… J’ai le droit d’être con de temps en temps, non ?
Dimanche 31 octobre
9h30 : J’avais oublié l’heure d’hiver : c’est quand j’allume ma Freebox, qui se règle automatiquement, que je me rends compte que nous avons gagné une heure. Je ne vais pas m’en plaindre, d’autant que, étant hypersensible à la lumière, voir la nuit tomber plus tôt m’apaise. Quitte à abandonner un changement d’heure, on ne pourrait pas abandonner l’heure d’été ?
Lundi 1er novembre
19h : D’habitude, je travaille pour Côté Brest le lundi et dessine le mardi ; vous trouvez étrange que je compartimente ainsi mon emploi du temps ? Vous pensez que rien ne m’y oblige ? Et bien si : je fais tellement de choses que je suis obligé de réserver à chacun de mes domaines d’activité un créneau bien déterminé si je ne veux pas risquer d’en laisser un à l’abandon pendant trop longtemps. Etant travailleur indépendant ET autiste Asperger, j’ai donc doublement besoin de prédéterminer exactement ce que je vais faire de mes journées, d’autant que contrairement à ce qu’on croit, plus l’emploi du temps est précis, plus il permet de variations. Ainsi, pour ne prendre qu’un tout petit exemple, comme la Toussaint tombait le lundi, j’ai exceptionnellement inversé mon calendrier de début de semaine : j’ai donc consacré cette journée au dessin ou, plutôt, à la peinture. En effet, il s’est trouvé un soir où j’ai recadré mes croquis de modèle vivant exécutés aux cours publics des beaux-arts : l’opération n’avait vocation qu’à me permettre de récupérer du papier blanc et de gagner de la place, ces dessins ayant été exécutés sur format raisin, le plus grand que l’on puisse trouver dans le commerce ; mais j’ai constaté que trois d’entre eux pouvaient être exploités pour une peinture. C’est donc ce que j’ai fait : j’ai encré ces dessins, je les ai découpés, j’ai peint sur toile trois décors appropriés sur lesquels j’ai collé les trois jeunes filles de papier. J’en ai profité pour écouler définitivement mon stock d’acrylique, bien décidé à en finir avec cette matière qui ne m’apporte pas autant de satisfactions que la gouache… Le résultat ? Vous le verrez bientôt dans une galerie d’art, j’espère…
Mardi 2 novembre
14h : En plein travail d’écriture, je commence à en avoir marre de voir le soleil frapper à ma fenêtre : je craque et je finis par fermer mon volet. J’avais pourtant bien promis de ne plus faire ce genre de chose depuis que j’ai réalisé à quel point la lumière était vitale ! Disons que point trop n’en faut et que j’ai déjà eu la dose dont j’ai besoin : après tout, l’eau est vitale elle aussi et on n’en boit pas vingt-quatre heures sur vingt-quatre pour autant…
16h : C’est avec soulagement que j’envoie ma copie à Côté Brest : en effet, je viens enfin d’utiliser la dernière des feuilles de note que j’avais accumulées par le passé. Il y a tant de paperasses qui s’entassent dans mon bureau que j’ai intérêt à tout faire pour écouler cette documentation bien utile mais encombrante ! D’autant que j’ai encore plein de livres et de documents divers à exploiter et que, même quand j’en aurai fini avec ce petit tas, je ne manquerai pas de sitôt de sujets à traiter : l’histoire de Brest est mille fois plus riche qu’on ne le croit…
Mercredi 3 novembre
12h : Encore un soulagement : je termine enfin le scénario sur lequel je travaillais depuis des mois. Bien sûr, il faudra encore que je fasse une grande relecture, d’autant que j’ai réalisé qu’il faudrait ajouter un élément que je n’avais pas prévu, mais j’ai écrit le mot « fin ». Bref, je le tiens, mon roman picaresque graphique en deux volumes ! Mais les éditeurs vont-ils me juger assez bon pour le dessiner moi-même ?
Jeudi 4 novembre
15h30 : Le jeudi est le jour que je consacre au courrier, au sens large du terme. Ainsi, pendant une bonne heure, j’accumule les brouillons de mail que je ne peux toujours pas envoyer, jusqu’à ce ma messagerie se débloque enfin ! Il aura tout de même fallu quarante-huit heures… Inimaginable ! Non seulement les règles de la poste ne me protègent absolument pas de la pub, mais elles m’empêchent de travailler ! J’entends déjà les branchés me dire que je n’ai qu’à prendre une adresse gmail : je m’y refuse car j’estime que Google en sait déjà trop sur ma pauvre personne ! Mais je dois bien avouer qu’éthique et efficacité ne se confondent pas toujours…
20h : J’ai un rendez-vous demain après-midi pour mon article ; je me dis que c’est peut-être l’occasion de ressortir mon dictaphone. Prudent, je l’essaie préalablement : il reste inerte. Je mets deux piles neuves : même résultat. Je comprends vite : l’obsolescence programmée a fait son œuvre, probablement accélérée par l’inactivité forcée due à la crise sanitaire et mon fidèle compagnon a rejoint le paradis des journalistes après huit ans de bons et loyaux services… Je me souviens que mes parents me l’avaient offert pour Noël, à l’époque où j’étais pigiste pour le blog de l’université… Je ne suis pas du genre à m’attacher aux objets, à plus forte raison quand il s’agit de matériel électronique, mais ce dictaphone m’a rendu de tels services par le passé que j’avoue, toutes proportions gardées, ressentir ce qu’éprouverait Tintin si on tuait son Milou… Non, Blequin ! Tu ne vas pas chialer pour ça, quand même ?
Vendredi 5 novembre
15h45 : Je ne sais pas ce que j’ai aujourd’hui, mais tout va bien ! J’avais une matinée assez chargée, je devais faire mes courses de la semaine, racheter du matériel, faire imprimer des documents et scanner un grand dessin au format raisin chez Bureau Vallée (l’épreuve que je redoutais le plus), finaliser mon courrier dans la foulée puis le poster, renouveler ma carte de bus… Et tout s’est bien passé. Tout s’est parfaitement emboîté, sans le moindre accroc ! Je ne suis plus trop habitué à ça ! Et là, c’est pareil : je suis à mon rendez-vous pour mon article, où je dois donc me passer de mon dictaphone, mais je découvre que je n’ai pas perdu la main pour la prise de notes. Bref, ça plane pour moi, à tel point que c’en est inquiétant ! Je demande à mon interlocuteur pourquoi il avait fallu trois semaine pour monter un film qui avait été tourné en deux semaines : il m’explique que le montage incluait une recherche iconographique poussée et, surtout, qu’un monteur professionnel a besoin, en moyenne, d’une journée entière pour monter trois minutes de film… Je m’en doutais un peu, mais j’ai quand même l’air fin, moi, avec mes vidéos montées en une poignée de minutes !
18h : Après mon rendez-vous, j’ai dû faire un saut à Guilers pour récupérer un vieux magazine que je dois revendre. J’appréhendais le déplacement, la commune où j’ai grandi n’étant pas des mieux desservies, mais une fois encore, la chance était avec moi, je n’ai pas eu à attendre longtemps entre chaque correspondance et je rentre à une heure tout à fait convenable, épuisé mais ravi. J’ai intérêt à ne pas me coucher trop tard si je veux rester sur un bon souvenir de cette journée avant que le destin ne change d’avis !
11h50 : L’acheteur de mon magazine a demandé à pouvoir le récupérer en mains propres et a convenu d’un rendez-vous devant l’Eglise : je remonte donc la rue et passe devant la résidence seniors qui la domine. Sur le trottoir, devant cet imposant bâtiment, un homme en blouse blanche qui n’a cependant l’air d’être un infirmier se grille une cigarette : comme cet édifice m’intrigue depuis trop longtemps, je prends sur moi de le déranger dans son flirt avec Dame Nicotine pour lui demander quelle est la différence entre un EHPAD et une résidence senior. Il me répond gentiment et m’explique qu’une résidence senior n’est pas médicalisée, que les pensionnaires y sont autonomes et ne sont même pas forcément très âgés, certains sont quinquagénaires ! J’avoue que je ne vois pas bien l’intérêt, dans ces conditions, d’aller s’enterrer dans ce genre d’établissement, mais après tout, s’il y a des seniors qui tiennent à rester entre eux, c’est leur droit ! Je remets ma carte à ce monsieur, cuisinier de son état : quand il la lit, il m’exhorte aussitôt à la laisser à l’accueil à l’attention de l’animatrice de la résidence qui pourrait avoir besoin de mes services… C’est comme ça qu’on trouve du travail : en osant sortir de sa bulle et en faisant jouer ses réseaux ! Car s’il fallait compter sur Pôle Emploi, on aurait plus vite fait d’attendre le jugement dernier…
12h : J’attends devant l’église, presque surpris d’entendre les cloches sonner à toute blinde ! Il est vrai qu’entendre ce bruit à midi n’a jamais représenté pour moi autre chose qu’une gène quand j’ai le malheur d’ouvrir les fenêtres… Mais je suis encore plus surpris de voir des gens sortir de l’édifice ! Je ne comprendrai jamais comment on peut encore croire, à notre époque, aux superstitions médiévales que les curés s’obstinent à répandre : si je n’avais pas si peur de me faire lyncher, je croasserais bien à l’attention de ces crapauds de bénitier dont les sourires d’imbéciles heureux suffisent à m’irriter prodigieusement… Mais bien plus que celle de la bêtise, c’est l’odeur du fric qui émane surtout de leurs personnes ! Pas de carré Hermès, certes, mais il suffit de voir comment ils habillent leurs mômes pour comprendre qu’ils ne sont pas issus des plus basses couches de la société… Car ils emmènent leurs mômes, bien sûr : s’ils voyaient un musulman (dont la religion est tout aussi débile, soit dit en passant) qui aurait le malheur d’emmener ses enfants à la mosquée, ils seraient les premiers à l’accuser de les embrigader pour en faire des terroristes, mais eux, ils ont le droit d’imposer leurs idées à leurs enfants et de les emmener se faire bourrer le crâne (et, occasionnellement, le fion) par un curé ! L’une des gamines marche avec des béquilles : je suis à deux doigts d’aller la trouver pour lui demander s’il ne trouve pas que Dieu se fout de sa gueule… Ils mettent un certain temps à sortir, je suis épouvanté par leur nombre : ce n’est pas la marée humaine, mais je ne pensais pas que ces lieux de perdition attiraient autant de nos jours ! Au moment où les cloches cessent enfin de résonner (c’est aussi casse-pieds que les muezzin qui gueulent comme des gorets qu’on égorge), deux crétins à moto font un boucan du diable en allumant leurs poubelles à deux roues… Entre les connards de chrétiens et les crétins de motards, je suis cerné ! Quand ils sont enfin tous partis, un gros type ferme les portes : il me salue, je lui réponds par un grognement indistinct. Je peux ainsi m’abriter sous le porche sans risquer d’être soupçonné de vouloir entrer dans cette usine à enconner…
12h20 : Mon client arrive. Je craignais sa réaction quand il découvrirait l’état passable du magazine qu’il m’a acheté, mais il savait à quoi s’en tenir et n’est donc pas gêné. Il me dit habiter à Perpignan et avoir l’habitude de venir passer la Toussaint à Brest : effectivement, s’il voulait économiser des frais de port, c’était le moment ou jamais !