Vous pouvez vous dire, comme ça,que ce n’est qu’un moment:que bientôt cela passera,qu’après quelques instantsdans la houle des galaxiesvous aurez oubliécet effroi d’indicible émoi...Que ce qui est n’est pas:cette main qui n’est plus tenue,ce regard lentement perdu,cette voix qui répète- Je ne vois rien dans la tempête- Je ne vois rien dans le désert,et ce poids qui pèse sur tout,cette pierre du ciel,tout ce noir aux paupières,tout ce vide cerné de fiel...Mais au vrai vous ne pouvez rien:le tréfonds vous attenddans le dédale qu’il y alà-bas dans votre mémoireoù tout se défera:tout ce que vous avez cru faire,vos bibles, vos savoirsvos commentaires absolusdevenus indicibles...Tu ne trouveras pas les motssans rappeler à toicette âme qu’on t’a arrachéesans la nommer, la recréer,lui construire un palais,l’y accueillir et ne rien direni ne rien dévoilerqui trahirait votre secret...(Peinture: William Blake)