Les organisations syndicales ont parlé de mobilisation historique, et, il faut le reconnaître, une grève pour l’école à laquelle, outre les profs bien sûr, se joignent les personnels de direction et d’inspection, ce n’est pas habituel. C’est dire à quel point la colère est grande face à ce ministre qui, en cinq ans, a mis l’école plus bas que terre, a achevé le travail de destruction méthodique commencé par ses prédécesseurs, a pris le covid pour prétexte pour dynamiter le peu de sens qu’il restait dans ce fatras nommé Education Nationale. Les annonces des changements de protocoles sanitaires, comme l’an dernier celles concernant les modifications des examens, ont été faites dans les médias, les dimanches, éventuellement même dans des articles payants. Les principaux intéressés (élèves, enseignants, parents) se sentent à juste titre pris pour des billes. L’objectif n’est clairement plus de permettre aux enfants et aux adolescents d’acquérir connaissances et compétences, mais de faire en sorte que leurs parents aient un moyen de garde gratuit pour pouvoir aller au boulot. Le délire blanquérien, mêlant programmes infaisables et consignes de « bienveillance » pour les évaluations, a achevé l’œuvre globale de ce ministre exceptionnel (Mélenchon y voit un « idiot utile », tant sa capacité à fédérer contre lui est forte).
Les derniers revirements et contre-ordres d’un protocole sanitaire qui n’en est même pas un a mis le feu aux poudres, d’abord dans le premier degré, puis dans les collèges et lycées. Les enseignants, qui bricolent avec les moyens du bord depuis des lustres, ont enfin fait entendre le ras-le-bol, l’usure, la fatigue extrême. Des salles qu’on ne peut pas aérer parce-que les fenêtres sont cassées et ne s’ouvrent plus, ça existe. Des profs malades non remplacés, ça existe et en plus ça se fait traiter d’absentéistes. Le matériel pour préparer les cours entièrement financés par les profs c’est la réalité (enfin presque : dans sa grande bonté, Blanquer nous offre une prime informatique de 150 € par an !). Vous en connaissez beaucoup des professions dans lesquelles les salariés payent pour travailler ? Dans le cadre sanitaire actuel, la règle veut que les salariés disposent de masques chirurgicaux (et pas des masques toxiques !) en quantité suffisante et de gel hydroalcoolique sur leur lieu de travail. Dans la trempette infernale que constitue une salle de classe non ventilée, c’est le moins que l’on peut attendre. Et bien, rien, des masques distribués au compte-goutte dans certains établissements, mais pour faire le boulot, on y va de nos propres deniers. Et je passe sur l’état de délabrement de nombreux bahuts (faux plafonds qui dégringolent, ordinateurs vieillissants qui mettent tellement longtemps à s’allumer qu’on a plus vite fait de faire l’appel sur nos smartphones — ça aussi, outil obligatoire pas du tout financé), la liste serait trop longue.
Que retenir de la mise sous tutelle de Blanquer par Castex ? c’est un début, mais cela ne suffit pas. Ce que l’on attendait hier, lors des manifestations, c’était la fin du mépris, des moyens réels, et surtout ça :
Photos réalisées lors de la manifestation pour l’école du 13 janvier 2022 à Bordeaux