Elle sait qu’il y aura toujours
la guerre entre le feu et l’eau
entre le rouge et la lumière
mais
elle ne veut pas
ne veut pas
de la guerre au goût de sang
pourtant
elle rêve là – sans bouger
devant la bouilloire
et chante à voix basse
avec l’eau qui bout
L’éveillée rêve debout
devant l’évier
tout est vivant souffle son rêve tendre
sauvage
une comptine de gouttes d’eau
Debout les mains sous l’eau
les femmes disent non à la guerre
dans un petit poème tendre
et sauvage une comptine
qui ne compte que les vivants
Claire Krähenbühl
Marie Hecberg, Femme Afghane, Huile sur toile
POUR HABIBA DE KABOUL
Que dire pour Habiba de Kaboul
interdite d’école par les Talibans ?
Quels mots pour elle et ses sœurs privées de parole
verbes, consonnes et voyelles ?
Quels cris risquer, quel secret partager ?
Je n’ai que mon poème dérisoire
qui murmure non, non, non, non, non
mais va se conjuguer aux autres, s’ajouter, se mêler,
Former un livre
s’en ira vers vous à travers les mers, les déserts,
forcera les frontières
des langues et des murs, des forteresses, des chaînes
des cordons de police
des barricades et des portes d’école
fermées
Quel chant inventer pour Habiba de Kaboul que les tyrans
veulent réduire au silence ?
Un chant qui dit oui, oui, oui,
OUI
Vous seules savez à quoi,
sœurs d’Habiba
Et toi, Habiba
de Kaboul
Denise Mützenberg
Claire Krähenbühl et Denise Mützenberg in AFGHANA UTOPIA, Collectif, 36 poétesses et poètes écrivent pour les femmes afghanes,
Le Miel de l’Ours, 2021, pp.29 et 38,39.
La totalité des ventes de AFGHANA UTOPIA sera versée à une Association en faveur des Femmes d’Afghanistan