Lancelot remonte vers Paris, en passant par Royat, à l’Hôtel Saint Mart où il rencontre le colonel Bonotaux du SMA, puis par Vichy. Il utilise le train spécial Paris-Vichy qui, deux fois par semaine, fait la liaison pour les ministres et les fonctionnaires qui s'arrête à la gare de Moulins-sur-Allier, point de passage de la ligne de démarcation en train.
Passer la frontière, à Moulins, ce n'est pas ordinaire, surtout pour Lancelot qui n'est pas encore retourné à Paris, depuis la défaite... Des soldats allemands, surgissent dans les wagons, vident les couloirs et réclament poliment dans chaque compartiment, les ''ausweis'' ( laisser-passer).
Selon la couleur, on reconnaît des ausweis, pour un voyage, ou plusieurs. Certaines catégories de personnes, bénéficient d'un ausweis permanent, comme Lancelot.
Les habitants de Moulins, peuvent présenter au poste de passage, un Ausweis für den kleinen Grenzverkehr (laissez-passer pour la petite circulation frontalière) provisoire... En règle générale, l'ausweis est très difficile à obtenir...
A la gare, la mère de Lancelot l'attend, seule, sans voiture ; et lui fait la surprise d'une promenade en vélo-taxi.
Qu'il semble étrange d'arriver à Paris, pour quelqu'un comme lui qui l'avait quittée avant l'armistice, et d'y reconnaître sa ville, vide, dans les mains d'allemands qui se sentent chez eux. Des drapeaux nazis ont remplacé les couleurs françaises. Les horloges, même, sont à l'heure allemande, plus matinales d'une heure.
Par crainte que l'automobile soit repérée et réquisitionnée, elle ne sert plus qu'aux alentours de Fléchigné.
Lancelot occupe avec sa mère un appartement rue Victor-Hugo ; avec eux également, une ''bonne'' - Louise M. - qui s'était déjà occupée de Lancelot quand il allait au petit-lycée Janson de Sailly.
La nuit, Paris est plongée dans l'obscurité et le silence, humiliée.
Abetz offre à Drieu le rôle culturel qu'il envisage pour lui, afin de servir les vainqueurs. C'est à la tête de la prestigieuse NRF, que Drieu revient ; après s'en être écarté reprochant à Paulhan de soutenir des écrivains communistes. Gallimard accepte, pour sauver la « maison » ; et un premier numéro est paru en décembre 1940.
Une ''liste Otto'' juge subversifs 850 auteurs et 2000 titres, et appelle à les faire disparaître des rayons de librairie.
Lancelot retrouve Drieu, non pas, comme il l'imaginait, en homme satisfait, à la tête de la Nouvelle Revue Française, mais en homme frustré de se retrouver, déjà, dans une voie sans issue... Faute de pouvoir faire l’œuvre littéraire qu'il imaginait, il aimerait, dit-il, être l'éminence grise d'un fascisme français ; qu'il ne voit pas dans ce Vichy pauvre et triste, et qui présente les mêmes tares que la France de gauche, qu'il a remplacé. « Peu de fascisme, peu de vie ! ».
Par l'intermédiaire de Drieu, Lancelot croise Otto Abetz, il l'avait rencontré en 1930, chez Jean Luchaire, quand se montait le projet de Sohlberg. Puis, ce professeur de dessin au lycée de Karlsruhe, a rejoint le NSDAP (1935) et animé le Comité France-Allemagne grâce auquel il a travaillé et sympathisé avec Drieu la Rochelle. Marié avec une française, Abetz s'est senti humilié quand il fut expulsé en début d'été 1939 par le gouvernement Daladier. A présent, il revient à Paris avec le titre d'ambassadeur du Reich à Paris.
Drieu a senti qu'Abetz n'avait pas vraiment confiance en Lancelot, qu'il rattache ( après Daladier...) à Vichy et à ses services de renseignements... Drieu, dit-il, tente de persuader les ''occupants'', de ne pas pratiquer ce qui fut une erreur de la France envers l’Allemagne. Il tente de convaincre Abetz, qui fait semblant de le comprendre, que le redressement de la France dans le cadre d'une nouvelle Europe pourrait être un modèle pour les autres nations. Drieu envisage un parti unique, avec Doriot à sa tête. Les allemands se méfient d'un parti unique, et préfèrent plutôt jouer des divisions internes du pays.
Drieu raconte à Lancelot son invitation à l’ambassade d'Allemagne le 15 août 1940, seul au milieu de dignitaires allemands ; sa gêne, son angoisse même, d'être en pareille compagnie...
Lors du retour des cendres de l'Aiglon, Drieu était aux premières loges, savourant la rencontre d'un Napoléon et d'un Hitler.
Mais Drieu semble déjà désabusé : il méprise '' le vieux '' conservateur de Vichy ( Pétain); et se rend compte que les allemands n'envisagent pas de ''relever'' la France...