Bien seule

Publié le 09 août 2008 par Mirabelle
Mon cher Victor,
 
Je suis bien seule. Ca commence bien, cette conversation ! Ben quoi ? Tu pourrais être un peu plus joyeuse ou au moins faire semblant... Mais ça va ! Tu dis que tu es bien seule ! Il y a un malentendu, Victor... Aucun malentendu ! Tu te lamentes sur ton sort, c'est tout ce que je vois ! Mais naaaaaaaaan ! Je veux dire que je suis bien... Seule ! Eh bien oui, c'est bien ce que j'ai compris ! Tu dis que je me lamente... Ah parce que tu ne te lamentes pas ?! A quoi ressemblent de vraies plaintes dans ce cas ? Je vois que tu n'as toujours pas compris... Je veux dire que je me sens bien. Hein ? Oui, je me sens bien seule, libre, sereine. En résumé, ma solitude me convient tout à fait ! Aaaaaaaaaaah ! C'est donc tout le contraire de ce que je croyais ! Exactement !

Ce matin, je me suis réveillée en réalisant qu'il n'était plus la première personne à qui je pensais en me levant, et surtout que ce petit miracle, faisait son effet depuis un certain temps déjà.
Cela m'a mise de bonne humeur. Je ne suis plus la même. Je ne suis plus celle qui attendait son retour, ni celle qui espérait que tout s'arrange. Cela fait quelques semaines que j'ai changé, quelques semaines que je me sens bien avec moi-même, quelques semaines que je suis fière de mon évolution, au regard de tout le chemin parcouru depuis trois mois. Celle que je suis aujourd'hui est intimement persuadée qu'il n'était pas le bon. Elle l'accepte. Sans tristesse, sans frustration. Elle se dit que c'est comme ça, tout simplement.
Alors oui, je suis bien seule, même si la solitude n'est pas une situation socialement valorisée. Je m'en fous. Parce que si c'est une solitude de fait, physique, ce n'est pas une solitude d'esprit : je rencontre des gens formidables, j'apprends à en mieux connaître d'autres, je m'ouvre au monde comme cela ne m'était pas arrivé depuis longtemps. Je me sens bien. Mon lit est grand et me va tout à fait comme il est, parce que comme ça je peux m'étaler comme je veux sans qu'on vienne me dire que je prends trop de place... Je ne me sens dépossédée de rien. Je suis un tout.
Je pourrai prêter de l'attention aux regards plein de pitié, à ces soit-disants amis qui me plaignent de devoir tout recommencer. J'aimerais pouvoir leur dire que je ne suis pas à plaindre, qu'il m'a, au bout du compte, rendu le plus beau service qui soit en me délivrant de lui. Mais je ne suis pas certaine que tous soient capables de comprendre ça. La solitude ne me pèse pas, c'est une force, un bien-être. J'ai la vie devant moi, et confiance en l'avenir. Je n'ai pas peur. Etre en couple constitue une norme, et la solitude est perçue comme une incapacité à communiquer. Sauf qu'il me semble que je n'ai jamais aussi bien communiqué avec les autres, et encore plus avec moi-même. Je m'écoute davantage. Je me comprends davantage. Et je me sens bien.
Ma solitude à moi me berce et m'enveloppe de ses bras, sans jamais trop me serrer. Ma solitude à moi n'est pas un enfermement, ni une prison. Ma solitude à moi est transparente, ce qui fait que j'ai les yeux grand ouverts. On peut passer au travers d'elle, parce qu'elle est dissolue dans le monde, elle en fait partie intégrante. Ma solitude à moi ne m'empêche pas de rêver et me tourne vers l'avenir en m'initiant aux bonheurs tout simples du présent. Ma solitude à moi ne me raccroche pas au passé, car le passé n'existe déjà plus. Ma solitude à moi n'est pas exclusive, elle ne me garde pas pour elle. Je sais qu'elle me laissera partir quand la vie lui fera signe. Je sais qu'elle me laissera partir quand la vie me surprendra. J'attends d'être surprise. Sans en faire une obsession. Je suis prête. Beaucoup plus prête que je n'aurais cru.
J'ai tiré beaucoup de leçons de ce qui m'est arrivé. J'y ai beaucoup réfléchi. Je sais les erreurs à ne plus commettre, les compromis et les pièges. Je n'en tire aucune amertume, tout cela m'aidera à mieux faire la prochaine fois. La prochaine fois ? La prochaine fois que je tomberai amoureuse. Je ne suis pas pressée. Cela arrivera le moment venu, mais ce moment si particulier, je saurai le reconnaître. Il viendra, j'en suis sûre, peu importe quand. La vie peut être si surprenante, il suffit de si peu de choses, dans le fond... Quelqu'un qui me plaît, quelqu'un à qui je plais. Des atomes crochus. Une vision de la vie. Des espoirs et des opinions. Des morceaux de rêve à partager. Humm... Tout ça en même temps, cela m'étonnerait que cela soit si simple ! Oui moi aussi. Mais je suis persuadée que ce n'est pas si inaccessible, pourvu que je continue à regarder autour de moi et à m'émerveiller de ce que je découvre...