Sois raisonnable! (suite)

Publié le 12 août 2008 par Mbbs

Emma marche sur la plage, elle a eu besoin de sortir prendre l’air et remettre de l’ordre dans ses pensées. Olivier a raison, il serait temps qu’elle grandisse et qu’elle arrête de se comporter comme une gamine face à Sophie, il ne faudrait pas renverser les rôles ! Olivier et elle, c’est une belle histoire et ses hésitations sont en train de tout détruire. Ils se sont connus au lycée puis perdus de vue comme beaucoup de jeunes, chacun allant son chemin, puis il y a eu ce fameux jour…elle revit ses souvenirs comme un film qui défilerait devant ses yeux.

 Au volant de son bolide, Emma fonçait à travers la ville. Elle aimait la sensation de puissance de sa MG et aspirait goulûment le vent qui lui fouettait le visage et s’engouffrait dans ses cheveux. Cette voiture, c’était son cadeau pour son cinquantième anniversaire, une belle carrosserie aux lignes arrondies, tout comme elle avait plaisanté son époux. Elle sourit à cette pensée et rit aux éclats en repensant à la tête de ses enfants quand la voiture avait été amenée devant le perron de leur maison…Cette journée était splendide et elle en profitait pleinement. Voyant une vieille dame attendre au bord d’un passage piéton, elle avait ralenti dans le but de la laisser traverser. Alors qu’elle s’arrêtait, de violents coups de klaxons avaient retentis derrière elle. Un homme semblait énervé par sa courtoisie et lui lançait des signes injurieux qui montraient son agacement. Elle avait décidé d’ignorer cette agressivité latente, avait redémarré et soudain manqué de se planter dans le décor, surprise par la queue de poisson du conducteur impatient. La moutarde lui était montée au nez et elle s’était mise à le poursuivre pour piler derrière lui au prochain feu rouge. Elle avait klaxonné à son tour en lui criant qu’il était un fou dangereux, ce à quoi il avait répondu en lui faisant un geste obscène. De rage, elle avait enclenché sa première et foncé dans la voiture! Le pare-choc de sa MG avait provoqué un désastre à l’autre voiture. L’homme était sorti comme un diable de sa cage et lui avait hurlé dessus. Calme et imperturbable, elle n’avait pas bronché. A ce moment, la vieille dame qu’elle avait laissée passer était arrivée et avait brandi sa canne face à ce malotru.
- C’est vous qui êtes dangereux, des types comme vous, il faudrait leur retirer le permis, la petite dame a eu raison, j’aurais fait de même et pire si je ne me retenais pas.
L’homme, étonnamment, était remonté dans sa voiture et était parti laissant Emma éberluée de s’en tirer à si bon compte. Une place se libérant, elle avait parqué sa voiture et s’était affalée sur une chaise de la terrasse d’un café, les jambes encore flageolantes
- Tu n’as pas changé, toujours la même, fougueuse et impétueuse !
Elle s’était tournée vers la personne qui avait prononcé ces paroles.
- Olivier, toi !
Et c’est ainsi que leur histoire avait débuté, par une rencontre fortuite. Ils s’étaient revus pour des lunchs, avaient partagé idées et lectures et leur amitié, mise en veilleuse pendant 30 ans, s’était ravivée. Insidieusement, des sentiments différents s’étaient glissés dans sa tête et son cœur. Elle avait commencé à attendre des signes, à guetter son nom dans la messagerie, à vouloir entendre sa voix, à se demander le matin s’il aimerait sa tenue, bref, elle tombait amoureuse. Honteuse d’un tel sentiment à son âge et dans sa situation, elle le cachait à tout le monde et surtout à lui jusqu’au jour où elle ne sait pourquoi, elle le lui avait dit. Crac d’un coup, elle avait prononcé les paroles qui l’étouffaient ! Ouf, quel bien cela lui avait fait mais vu la tête qu’il avait tiré, elle s’en mordait déjà les doigts se traitant de folle, de midinette sur le tard et de veille croûte qui fantasmait.