<< Poésie d'un jour
Photo G.AdC
Siamo uccelli che fuggono il freddo andando a nord
dove il vento porta via saliva e sillabe. Giunti qui, a
questo vetro intorpidito dal respiro.
Ho visto rane, tessuti, una testa tornare alla vita :
dove è lingua elettrica che dà voce e sguardo alla
tua carne malinconica ?
In questa bianca oscurità ho raccolto terra nelle
tasche, elettroni sotto le unghie. Cresci di dimen-
sione, abbracci le radici alle mie orecchie.
Essere qui a calpestare le nostre stesse ombre. Anche
se lontana vedo la lava sotto la zolla : ha il colore di
nube che rimanda lo sguardo, di un coltello tra due
pagine.
C’è il cratere di una voce che risale il calcagno ma in
questa oscurità non c’è distanza. L’attesa ha l’odore
di un processo.
Nottetempo, l’orecchio destro asciutto, il piede che
batte in sogno : ti avvicini e mi spiani le rughe alla
fronte. Ed io al mattino ricalzo ogni impronta pas-
sata.
Elisa Biagini, « Corrente alternata (dal diario di Mary Shelley) » in Filamenti.
Nous sommes des oiseaux fuyant le froid allant vers
le nord où le vent emporte salive et syllabes. Ici réu-
nis, à ce verre engourdi par notre haleine.
J’ai vu de grenouilles, des tissus, une tête revenir à
la vie : où est la langue électrique qui donne voix et
regard à ta chair mélancolique ?
Dans cette obscurité blanche j’ai recueilli de la terre
dans mes poches, des électrons sous mes ongles. Tu
augmentes de dimension, tu m’embrasse à la ra-
cine des oreilles.
Être ici, c’est piétiner nos propres ombres. Même si
au loin je vois la lave sous la motte : elle a la couleur
du nuage qui renvoie le regard, d’un couteau entre
deux pages.
Le cratère d’une voix remonte le talon, mais dans
cette obscurité il n’est pas de distance. L’attente a
l’odeur d’un processus.
Pendant la nuit, l’oreille droite sèche, le pied bat-
tant en rêve : tu t’approches et mes détends les rides
du front. Et moi, le matin, je me rehausse toute
empreinte effacée.
Elisa Biagini, « Courant alternatif (du journal de Mary Shelley) » in Filaments, Traduit de l’italien et préfacé par Roland Ladrière, Le Taillis Pré, 2022, pp.122,123,124,125,126,127.
___________________________________________________________________________________________________________________________________
___________________________________________________________________________________________________________________________________
ELISA BIAGINI
Source
■ Elisa Biagini
sur Terres de femmes ▼
→ Nel bosco | Dans le bois (lecture d'AP)
→ [Les nuits se ferment] (poème extrait de Depuis une fissure)
→ Depuis une fissure (lecture d’AP)
→ Sotto i castagni (extrait du recueil L’ospite)
→ Anne Sexton | Elisa Biagini | Due mani... Due voci (trois poèmes extraits de Nel bosco, avec leur traduction en français par AP)
→ (dans l’anthologie poétique Terres de femmes) Da una crepa
→ (dans la galerie Visages de femmes) le portrait d'Elisa Biagini (+ un poème extrait du recueil L’ospite et un autre extrait d'Acqua smossa)
■ Voir | écouter aussi ▼
→ le site personnel d’Elisa Biagini
→ (sur Lyrikline) dix poèmes d'Elisa Biagini dits par Elisa Biagini (+ traduction française)
→ (sur Poetry International Web) une une bio-bibliographie d’Elisa Biagini (+ de nombreux poèmes)
→ (sur Terres de femmes) Portrait de Marie-Ange Sebasti