Un entrefilet du journal, nous apprend le suicide de Stefan Zweig et de sa femme, au Brésil !
Les mois de janvier et février 1942, ont représenté l'hiver le plus sombre, les mois les plus froids de la guerre ; difficile de chauffer les pièces de l'appartement à plus de 10,12°. Le journaliste André Arnyvelde, connu pour sa belle plume et sa curiosité qui mêle religion et sciences, est arrêté en décembre et meurt d'une pneumonie en février. Fernand Holweck (1890-1941), physicien, lui aussi arrêté par la Gestapo en décembre, meurt sous la torture dix jours plus tard. Holweck avait rejoint le laboratoire des Curie, en 1910. Il a réalisé une pompe à vide moléculaire qui porte son nom ; et a travaillé à améliorer la puissance des émetteurs TSF.
La difficulté était de réaliser de tubes électroniques de forte puissance en conservant le vide intérieur malgré la sublimation du métal des électrodes. Les électrons qui circulent dans une lampe de radio supportent mal de se heurter aux molécules de gaz, et c'est pourquoi un vide excellent est nécessaire dans les ampoules.
Une lampe Holweck est mis en place en 1923, sur l'émetteur de la Tour Eiffel. Il s'intéresse au microscope électronique, aux amplificateurs de lumière, aux compteurs de photons. Il fait également des recherches en astrophysique, et en radioastronomie. En 1940, près de Saint-Dizier, avec le groupe du pilote Antoine de Saint-Exupéry, il travaille à améliorer les bimoteurs Potez 63. Il refuse de quitter la France, et s'engage à aider les aviateurs britanniques sur le territoire occupé.
Lancelot, toujours passionné par le progrès technique, et les avions, était impatient de visiter les hangars du Musée de l'Air, installé à Meudon depuis 1921... Cette soirée du 3 mars 1942, bénéficiait d'un chaleureux clair de lune. Une autorisation spéciale l'autorisait à découvrir d'immenses hangars où " s'enchevêtrent dans un affreux désordre des avions entiers, d'autres démontés, des nacelles d'osier au curieux dessin, et , suspendus au plafond, d'étranges cerfs-volants, tandis que, sur le sol, reposent quelques quatre cent moteurs mal protégés de la rouille. "
Il devait passer ensuite une soirée agréable dans une proche auberge de la forêt de Meudon. C'était oublier la guerre ; et ce à quoi on ne pouvait croire ici, des bombardements de la RAF, sur des civils... On ne se méfiait pas du ronronnement lointain des avions que n'accompagnait aucun tir de D.C.A. Ce qui semblait confirmer leur itinéraire habituel : l'Allemagne.
Tout a commencé vers 21 heures 15, au-dessus du bois de Boulogne. Précédées par des nombreuses lumière rouges, les premières bombes tombèrent sur Billancourt dans un bruit épouvantable, atteignant les usines Salmson.
Lancelot voulait revenir sur ses pas, s'éloigner et se mettre à couvert vers des bâtiments de l'aérostation ; trois projectiles sont tombées non loin, il a perdu connaissance. Protégé par un mur, seuls ses deux pieds sont écrasés, par les décombres de l'explosion.
Des ambulances, des camionnettes vont et viennent. Sur des brancards recouverts de couvertures, on amène des morts atrocement mutilés.
Lancelot se réveille alors qu'il est amené vers une clinique parisienne de la rue Boileau.
Ce soir-là, donc, les avions de la Royal Air Force (RAF) étaient venus pilonner plusieurs positions stratégiques des Allemands en Ile-de-France, dont les usines Renault de Boulogne-Billancourt (Hauts-de-Seine). Mais pas seulement....
On dit que les pilotes de la RAF auraient confondu la boucle de Seine avec le méandre de Boulogne-Billancourt ; à moins que la véritable cible était l'état-major allemand installé à Saint-Germain... ?
Le raid du 3 mars 1942, aurait fait plus de 370 victimes.