Il y a dix jours, une famille de quatre personnes, deux enfants de 8 et 11 ans et leurs parents, ont été retrouvés morts, drogués et assassinés à coups de masse. L’un de leurs assassins avait par le passé été condamné pour un viol suivi de meurtre, et purgeait à domicile une peine pour détention illégale d’armes. Il portait un bracelet électronique dont il parvenait à se défaire pour le confier à son jeune fils. Les services pénitentiaires savaient pertinemment que sa ligne téléphonique était coupée faute de paiement. Il semblerait que le mobile du crime soit la vengeance, la maman des enfants ayant été la complice du meurtrier principal il y a plusieurs années dans un cambriolage.
Hier les corps de trois jeunes hommes criblés de balles ont été retrouvés dans un fossé. Ils avaient disparu il y a une semaine. Lorsque l’épouse de l’un d’eux avait signalé sa disparition, le policier ne l’avait pas prise au sérieux, s’interrogeant à haute voix sur une escapade extra-maritale collective. On sait seulement que l’une des victimes était très fortement endettée.
Cette semaine aussi, le corps d’une jeune mère de cinq enfants a été retrouvé sans vie. Depuis plusieurs mois, elle avait signalé à la justice que son ex-mari voulait la tuer. Face à l’inaction des pouvoirs publics, elle avait contacté les médias qui avaient abondamment relayé son enfer. Sans résultat puisque l’homme est passé à l’acte avant de mettre lui-même fin à ses jours.
Quotidiennement les medias se font l’écho d’au moins une attaque à main armée ayant mal tourné, soit que l’assaillant ait fait feu, soit que la victime potentielle se soit défendue les armes à la main. Le monte-en-l’air désarmé qui s’introduit chez vous en votre absence n’existe plus sur les bords du Rio de la Plata : il force l’entrée de votre domicile en vous collant un canon sur la tempe quand vous rentrez du supermarché. Quant à la police, il vaut mieux ne pas la prévenir dans ces cas-là car elle cherche surtout à abattre les malfaiteurs, et tant pis pour les dommages collatéraux.
On a arrêté de faire des statistiques, vu qu’elles étaient trop mauvaises. En haut lieu, on clame donc qu’il n’y pas d’insécurité. Tout va très bien, Madame la Marquise. Ou plutôt : todo bien, Señora Presidenta…