Geneviève a donné naissance à une fille, le 10 septembre 1944. Lancelot a souhaité l'appeler Elaine.
Maurice Garçon, avocat, qui s'inquiète des excès d'une justice expéditive, serait prêt à intervenir et à défendre Geneviève, si elle devait être inquiétée.
Geneviève, à Fléchigné est loin de Paris, et sympathise avec l'institutrice du village.
Dans les communes libérées, et hors danger, la rentrée scolaire a lieu de 2 octobre 1944. Odette Tounord est la seule en poste, dans son école rurale de filles, Geneviève vient l'aider et tient à présenter aux plus grands des notions de calcul et de sciences en ''leçon de choses''. Une collègue suspectée de collaboration et qui a participé à une propagande pro-allemande à l'intérieur de leur classe a quitté la région et sera relevée de ses fonctions en 1945. A l'école de garçons, sur les deux instituteurs, l'un est prisonnier de guerre. Odete Tounord, adhérente au SNI, a assuré une structure syndicale clandestine et a soutenu son mari dans son activité résistante.
Chaque jour paraît dans la presse une liste de personnes arrêtées . A côté des ''commissions d'épuration '' ( créées depuis août 1943 au sein de la Résistance), se tiennent des procès iniques, ou même sans procès, et sont décidées des exécutions sommaires. Des lynchages s'improvisent autour de cortèges haineux, des femmes sont tondues. La foule est excédée de privation, traumatisée de peur et de deuils.
" Il nous est resté la haine. (...). A la haine des bourreaux a répondu la haine des victimes... Eh bien, c'est de cela que nous devons triompher d'abord. " Albert Camus, " Défense de l'intelligence ", 15 mars 1945.
Le 7 septembre 1944, Pétain et Laval s'imaginent encore gouverner de Sigmaringen sous le contrôle des allemands. Le château médiéval appartient au prince Frédéric de Hohenzollern et à la princesse Marguerite, fille du dernier roi de Saxe, que la Gestapo a interné avec ses sept enfants, pour loger le gouvernement fantôme de Pétain.
Le 9 septembre, le général de Gaulle met en place et préside le gouvernement provisoire de la République Française ( GPRF). Il nomme vingt-deux ministres, dont André Diethelm (1896-1954) au ministère de la Guerre, auquel appartient Lancelot. Parmi les ministres, on distingue deux communistes, quatre socialistes ( SFIO), trois MRP, trois radicaux. Le mouvement Républicain Populaire,( MRP) est une sorte de mouvement démocrate chrétien qui se constitue lors de son congrès du 26 novembre 1944. L'inquiétude du général de Gaulle, est de garder la maitrise de la situation face au parti communiste.
Après ''l'accident'' dont Lancelot fut victime, ses contacts avec le ''SR'' ont été suspendus. Puis, les événements politiques et militaires n'ont pas permis à Lancelot de pouvoir reprendre une activité efficace.
Il attend de la part du gouvernement provisoire, une nouvelle affectation.
Pour ce qui est du ''SR'', je rappelle qu'averti par l'Intelligence Service, le 5 novembre 1942, Louis Rivet ( commandant des services spéciaux militaires français rattachés à Vichy) avait donc rejoint Alger, suivis du colonel Ronin et du commandant Paillole qui est d'abord passé par Londres. Ses services avaient toujours été en contact avec Londres. Rivet se met sous les ordres du commandant en chef, le général Giraud ; avec pour objectif la préparation d'opérations de libération du territoire national.
Beaucoup d'officiers de l'EMA ( Etat Major) de l'ancienne ''armée d'armistice'' ( dissoute en nov 42), attendaient le débarquement en Provence. René Carmille, avait établi un fichier de 220 000 noms localisés en zone sud et prêts à se mobiliser. Les allemands l'arrête le 3 février 1944, il mourra en déportation.
Giraud s'il restait proche du Maréchal - qu'il considérait prisonnier de ses ministres, en particulier de Laval - misait sur les américains. Ainsi, il semblait bien que, avec Darlan et Giraud, en Afrique, la France de Vichy reprenait les armes.
Mitterrand a effectué un séjour à Alger, via Londres, pour offrir ses relais dans le commissariat aux prisonniers ; il avait joint également les anciens du "104" rue de Vaugirard de la Fédération des étudiants catholiques, par lesquels Lancelot fut recontacté. Il permit également d'y associer quelques-uns des services de la Jeunesse et de l'Information, et des hommes d'Uriage.
Mai 1943, De Gaulle a rejoint Alger et s'affirme comme le seul chef de la Résistance française.
En avril 1944, le colonel Louis Rivet nommé général, est admis a la retraite .
Le 7 mai 1944, le lieutenant-colonel Paillole part en mission secrète pour Londres, il va être associé à la préparation du débarquement de Normandie au SHAEF, le QG des forces alliées en Europe commandé par le général Eisenhower.
Octobre 1944Chacun s'interroge sur le retour des libertés : toujours pas de liberté de la presse, de liberté d'expression. Les élections pour un nouveau parlement sont repoussés à 18 mois. On nomme " un assemblage de résistants sous le titre d'Assemblée consultative " ( Maurice Garçon) et on crée des tribunaux d'exception. Peut-on attendre autre chose du général de Gaulle ? Certains disent, non ; d'autant plus, s'il se laissait déborder par les communistes.
Des V1 ou des V2 sont tombés sur Paris. Ils seraient envoyés d'Allemagne !
La résistance aurait donc été très secrète; en effet, on voit sortir beaucoup de " visages inconnus qui revendiquent tout et qui parlent haut. " ( M. G.)
Jacques Boulenger est mort, ce 22 novembre 44, proche d'Aber Bonnard et de Doriot, il se cachait depuis deux mois. Aviateur pendant la première guerre, il était d'une autre époque, celle du dandysme et des duels.
Lancelot retient de lui ''l'esprit chartiste'', sa connaissance de l'œuvre de Rabelais, et son érudition. Il l'avait rencontré à l'occasion de son adaptation des Romans de la Table ronde, qui reste une référence. ( perceval.over-blog.net/2020/11/jacques-boulenger-les-chevaliers-de-la-table-ronde.html )
Après " L'Étoile mystérieuse", la publication en France du '' Secret de la Licorne '' d'Hergé a commencé dans " Cœurs Vaillants".
Georges Remi dit Hergé (1907-1983) a débuté dans une revue scoute en 1924. Il commence, en 1929, les aventures de Tintin dans le quotidien belge '' Le Vingtième Siècle''. C'est le journal '' Cœurs Vaillants'' - magazine hebdomadaire catholique social, pour jeunes, créé en 1936 par les Pères Gaston Courtois et Jean Pihan - qui fait découvrir Tintin dans la France de 1930. Toutes les aventures de Tintin, jusqu'au Temple du Soleil, paraîtront dans Cœurs Vaillants. En 1940, le journal ne paraît plus qu'en zone libre, sous le patronage de Pétain.
En Belgique, Hergé travaille au supplément jeunesse '' Le Soir '', quotidien qui paraît sous le contrôle allemand. Sur de petits fascicules paraissent les aventures de Tintin, puis quotidiennement sur une bande en bas de page du journal.
Le 31 mars 1943, la Gestapo, à Paris, ferme les locaux de l'Union des Œuvres ouvrières catholiques et arrête le père Pihan. Il est arrêté et emprisonné à Fresnes d'où il ressortira 3 mois après.
Le 3 septembre 1944, Bruxelles est libéré et tous les journaliste du quotidien '' Le Soir'' sont interdits de publication. Le 9 septembre, Hergé est arrêté par des agents de la Sûreté de l'Etat. Il ne sera ''blanchi'' qu'en mai 1946, avec l'obtention de son certificat de civisme. Ensuite, Raymond Leblanc, résistant, fondateur du journal Tintin en 1946, lui permettra de revenir à son métier.