<<Poésie d'un jour
Aquatinte de G.AdC
XV
Il cuore sanguina, si perde il cuore
goccia a goccia, si piange interioramente,
goccia a goccia, cosi, senza rumore,
e lentamente, tanto lentamente,
si perde goccia a goccia tutto il cuore
e il pianto resta qui, dentro la mente,
non si piange dagli occhi, il pianto vero
è invisibile, qui, dentro il pensiero.
XVI
Sul bianco della brina a lenti fiocchi
si perde un po’ di neve silenziosa ;
tu avevi un’ombra nera dentro gli occhi,
ogni giorno ti toglieva qualcosa…
Fa così freddo, ti copro i ginocchi,
tu segui la tua ombra misteriosa,
quella farfalla nera viva e greve,
non l’hai neanche guardata quella neve.
XVII
Quanto chiarore e verde e gioventù
perduti con la neve sopra i cuori,
oh padre mio che non sorridi più,
che non t’importa più niente del fuori…
Più in alto, più chiaro e alto lassù,
sul vivo nero di tutti i dolori,
e il tuo cuore che nevica, lo sento,
lentamente, così, senza un lamento.
XV
Et le cœur saigne, ainsi se perd le cœur
goutte après goutte, et on pleure en dedans,
goutte après goutte, ainsi, oh sans clameur,
et lentement, tellement lentement,
se perd, goutte après goutte, tout le cœur
et les pleurs restent, ici, en dedans,
les yeux ne pleurent pas, les larmes vraies
sont invisibles, là, dans la pensée.
XVI
Sur la blancheur de givre en flocons lents,
se perd un peu de neige silencieuse ;
tu avais une ombre noire devant,
et chaque jour t’enlevait quelque chose…
Il fait si froid, je suis là te couvrant,
toi tu poursuis ton ombre mystérieuse,
ce papillon vif, oppressant, et noir,
cette neige, tu n’as pas pu la voir.
XVII
Que de clarté, de jeunesse perdues,
de vert, avec la neige sur les cœurs,
oh toi, mon père qui ne souris plus,
pour qui n’importe plus rien d’extérieur…
Plus en hauteur, plus clair, et au-dessus,
sur le noir vif de toutes les douleurs,
se tient ton cœur qui neige, je le sens,
sans une plainte, ainsi, très lentement.
Patrizia Valduga, Requiem in Le Livre des Laudes, précédé de Requiem, Traduit de l’italien et présenté par Christian Travaux, Arfuyen 2023,pp. 68, 69,70, 71, 72, 73.
P A T R I Z I A V A L D U G A
« L’œuvre poétique de Patrizia Valduga frappe par le contraste que forme une thématique d’une extrême violence, qui tend à leur point de rupture les pôles d’Eros et de Thanatos dans une atmosphère de passion funèbre, et un très grand raffinement dans le choix des formes classiques dont la rigueur rehausse la violence du poème : tercet dantesque, quatrain, mais aussi huitain ou sonnet. La violence charnelle, la dégradation et l’obscène sont contenus dans un corset de formes pures et traditionnelles qui rappellent à la fois les protocoles sadiens, la dépense de Bataille, Les Lois de l’hospitalité et, plus encore, les œuvres récentes de Bernard Noël ou de Franck Venaille… » (Martin Rueff, in Po&sie, n° 110, « 1975-2004 | 30 ans de poésie italienne », 2, Belin, 2005, page 357).