Enfin les vacances. C’est ce que je me suis dit en laissant deux ou trois consignes à mon remplaçant temporaire et en claquant la porte de mon bureau. Le temps était compté car il fallait qu’en trois petites heures nous rentrions à la maison, nous faisions nos valises et repartions en direction de la gare Montparnasse, tout en conservant le plus possible l’étanchéité de Snooze, innocente victime d’une intoxication alimentaire causée par l’hygiène douteuse des tenanciers du self de notre entreprise chérie.
La mission était pourtant simple: être les plus organisés possible, ne rien oublier, et pas seulement les chaussettes et les petites culottes. Notre appartement ayant tendance à nous réserver surprise sur surprise, il était hors de question de le quitter sans penser à fermer eau, gaz et électricité et invoquer sainte Radadasse, la sainte des propriétaires d’appartements biohasards. Nous avions prévu une heure pour rejoindre la gare en parcourant dix petites stations sans changement. C’était sous-estimer la RATP et ses brillants agents qui ont laissé végéter près d’une demi-heure en station plusieurs rames de métro sans informer les passagers comprimés et à la limite de l’évanouissement. Cerise sur le gâteau, une grappe de contrôleurs s’est mise à faire du zèle en contrôlant l’ensemble des passagers au bord de l’asphyxie, provoquant ainsi un goulot d’engorgement et ralentissant de facto bon nombres de vacanciers à deux petits doigts de rater leurs trains respectifs.
Les vilains et décérébrés contrôleurs ont fini par céder à la pression de la foule qui ne s’est pas gênée de les traiter de connasses(ards), de crétins et d’incapables. L’ambiance était donc survoltée avant d’atteindre à l’arrache la voie de notre train, et accessoirement la voiture située en treizième position, c’est-à-dire très loin au fond du quai, là-bas là-bas dans la forêt.
Nous sommes enfin arrivés à Saint-Pierre Quiberon, son port, sa plage, son marché, son Spar, sa crêperie des nains et sa cour d’Orgère. Une grosse semaine pour profiter du microclimat légendaire de la presqu’île et de son eau à 17°C. Un délice pour raffermir les chairs les plus molles. Je me suis entraîné depuis des mois pour préparer de la pâtisserie bretonne bien riche aux parents de Snooze. J’ai commencé par le plus facile en préparant un Farz Breton. Il suffit de mélanger 250 g de farine, 200 g de sucre, 4 oeufs et 750 ml de lait entier, mettre la mixture dans un moule, y ajouter des pruneaux (ou pas) et déposer à la surface des tranches de beurre salé. Quarante-cinq minutes plus tard à 160°, cela donne ça:
Je me suis également amusé à préparer un gâteau breton, certainement ma pâtisserie bretonne préférée. La préparation est d’une simplicité enfantine car il suffit de former une pâte en mélangeant 250 g de farine, 250 g de beurre salé, 250 g de sucre et 6 jaunes d’oeufs, de la déposer dans un moule à manqué, de l’aplatir, de la badigeonner d’un mélange lait-jaune d’oeuf-sucre, de faire un joli dessin avec une fourchette et de laisser cuire 45 minutes à 180°.
Mais l’Oscar de la pâtisserie la plus grasse et plus sucrée, mais aussi une des plus délicieuses, revient au Kuign-Aman. Rien de plus simple pour la préparer car il ne s’agit ni plus ni moins que d’une pâte à pain fourrée de beurre salé et de sucre. Huit cent grammes de pâte à pain, 350 g de beurre salé et autant de sucre sont nécessaire pour préparer cette arme de destruction massive. Il faut tout d’abord étaler la pâte à pain en formant une grande crêpe, la recouvrir intégralement de beurre et de saupoudrer le tout de sucre. Il faut ensuite plier la crêpe en quatre, la laisser reposer quelques minutes, l’aplatir pour mieux la replier en quatre et la déposer dans un moule. Trente minutes à 220 °C seront nécessaire pour faire cuire le gâteau au gras.
J’ai bien l’intention de laisser la famille Snooze se goinfrer. L’intoxication alimentaire de Snooze lui a permis d’avoir un ventre encore plus plat que d’habitude. J’ai intérêt à faire attention à ma ligne et ne pas trouver de bonnes excuses pour me dispenser de mon footing à la fraîche sous peine de me faire plaquer par mon cher et tendre.
Les vacances commencent bien.
NB: Connerie de microclimat. Il flotte.