(Pensées du soir, XIII) De l’aube revenue.- Quelle adorable personne s’est-elle vêtue ce matin de quel parfum et de quelle parure de prairie aux corolles de printemps ouvertes comme autant de mains à l’onction du ciel... Du retour annoncé. - Et lorsque tout te semblerait si parfait que cela te paraîtrait achevé, la grâce de tout recommencer te serait accordée comme au début de chaque matinée... De l’éternel présent.- Ceux qui veillent depuis toujours, veilleuses et veilleurs des quatre coins des nébuleuses, le savent a jamais : qu’il n’y a que le présent des choses qui puisse vous révéler votre éternité... De la timidité.- Mais puis-je vivre encore et donner encore un peu d’eau à l’assoiffé dont les jambes sont paralysées, demande la toute vieille en clignant de l’œil à l’eau du puits, et son miroir sourit... De ce qui compte.- L’inventaire admettra la priorité du café et des médias, du déodorant et du cinéma, de tout ce qui cesse de nous démanger que nous avons mangé et donc du ventre où se confrontent le serpent et le dieu caché, et le bain de soleil en été et le bain de silence aux égarés d’avance... De l’infertilité.- Laisse-toi pénétrer, te murmurait le soir la Nature en manteau noir dont les doigts en éventail peignaient tes longs cheveux dorés par ces faciles étés des bonheurs dérobés , et tu laissais couler en toi la nuit aux paupières baissées... De l’insécurité.- Vous ne savez ce qui vous attend, qui monte du fond de la pensée, vous craignez plus que tout votre ignorance et de le savoir vous ferme à ce qui justement serait un début de connaissance... De la vaine certitude.- Sûrs de leur savoir les sachants, que je sache, n’auront jamais su que savoir de source trop sûre, au dam du sourcier qui sait que rien n’est sûr que le secret de la source cachée... De l’âge de la nuit.- Tes joues fraîches sont d’un enfant qui dort, mais ton flanc d’un athlète après l’effort se plie et se déplie sous l’effet d’un cœur pris du remords d’une amoureuse infidèle et la nuit passe, les années passent dans le sommeil sans bruit des hirondelles endormies, autant de corps qui se délassent et se déplacent entre les cœurs jusqu’au jour retrouvant ses heures... De l’inattendu.- Ce qu’il y a de meilleur en vous, et c’est le sage en vous qui le dit, n’est autre que ce caillou sans bruit dont on ne sait s’il est du jour ou de la nuit, âme nue ou pur esprit et qui sait, à ce que dit encore le sage en vous, ce que sont les choses... Du faux semblant .- Ce qu’ils croient leur choix n’est que leur façon de se leurrer du fait qu’ils ne sont que les proies du désespoir, et comment ne pas le voir à leur façon de broyer du noir en feignant d’en sourire... De l’apaisement.- Plus tard votre vue baissera, aussi vous semblera-t-il que la beauté s’éloigne alors que vous seul vous éloignez, la beauté au cœur, et la bonté... De notre présence .- Je ne saurais dire absolument qui est là quand je suis là et que tu es là, ni dire absolument qui n’est plus là, restant ici sans toi... De l’équilibre.- Ce n’est pas à la prétentieuse maîtrise des phénomènes que nous aspirons mais à la conversion des pertes et des tracas en possibles radieux, et cela vaut pour les parcours d’arêtes aux incidents réversibles et aux traversées du désert fertiles en enseignements variés, autant dire que la compulsion même instinctive et la transmutation des métaux lourds en substructures laissant passer la lumière seront appréciées dans les nouvelles combinaisons d’énergie indispensables au maintien debout de l’artefact ou de la personne concernés... Image JLK, 2017: le sans-abri de San Diego.